NOUVELLES ET FRAGMENTS par Valclair

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Envol

 

 

Au matin le verre était vide.

Mais de son élixir j’étais empli.

Je suis sorti de la taverne laissant là des compagnons qui n’en étaient plus, des demi-putes alourdies de tristesse, les couloirs obscurs de mes nuits, ma sécheresse de cœur. J’ai frissonné dans l’air vif, et je me suis accoudé, ébouriffé de vent, à la rambarde accrochée sur le vide…

Tandis que s’effrangeaient les brouillards, j’ai vu le bon géant de la colline qui s’éveillait, étirant son vaste corps et saluant le matin frémissant…

J’ai vu son chapeau petit, cône comme une pagode, promesse de voyage, son front puissant, et son regard, tourné vers le ciel moutonnant…

J’ai vu, au rebord de ses lèvres, l’esprit, improbable sémaphore sur la falaise de son visage, j’ai vu ses bras qui se dressent, s’abaissent, commandant au ciel, au soleil en cascade…

Et puis j’ai vu le geste ample de son bras d’humus et de fougère, j’ai vu sa main qui s’ouvrait et du creux de ses doigts s’envolant, j’ai vu l’oiseau, l’oiseau s’élever comme une offrande…

Et je l’ai suivi des yeux, l’oiseau, j’ai suivi les volutes sinueuses de son vol, jusqu’à ce qu’il s’efface, jusqu’à ce qu’il se perde dans l’éclair blanc du matin.

Je suis retourné dans la taverne.

Ho, cabaretier, sers moi, sers-moi et un plein verre, s’il te plait, et que je ressorte...

Et que je retrouve l’oiseau et qu’il me prenne entre ses ailes et que nous voguions dans le vaste ciel, laissant là à jamais mes compagnons qui n’en sont plus, les demi-putes alourdies de tristesse, les couloirs obscurs de mes nuits et ma sécheresse de cœur.

 

Ecrit pour Paroles plurielles, octobre 2006, sur une photo d'Alain, très porteuse pour l'imaginaire.

 

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