19/12/03
: Fatigué :
C'est curieux, je n'ai pas envie de me mettre à
écrire. Je me suis installé devant mon ordinateur parce que c'est
le week-end qui commence, que je viens de rentrer du travail et que je n'ai rien
de particulier à faire, j'ai ouvert l'ordinateur par habitude, presque
par réflexe, mû aussi par cette idée que je n'ai rien écrit
de la semaine et que je le dois, je me le dois à moi-même, je le
dois aux quelques uns qui me lisent. Réaction idiote évidemment.
J'ai été me promener un peu chez les diaristes mais sans grande
conviction, sans grande appétence. Avec l'impression tout à coup
de m'éloigner brusquement, sans l'avoir décidé, sans l'avoir
choisi de la planète diariste
Peut-être est-ce la fatigue
simplement. J'ai beaucoup travaillé toute cette semaine. J'ai travaillé
avec satisfaction finalement, j'ai abouti, j'ai quasiment terminé le projet
sur lequel j'étais, j'ai pu déposer quelquechose qui se tient, je
peux prendre sans souci les vacances qui commencent pour moi aujourd'hui, sans
avoir (presque) à travailler à la maison pendant ces quelques jours.
Mais je suis vanné. Envahi surtout dans ma tête. Ça m'a pris
la tête comme on dit ! J'ai beaucoup rédigé pour ce projet,
j'ai très souvent été devant l'ordinateur au bureau, c'est
pour ça aussi peut-être qu'il y une saturation, face à l'écran,
face au clavier même pour des écritures d'un tout autre ordre.
J'ai
envie de me laisser aller, de buller sans trop penser, sans faire d'effort, même
pas celui d'écrire, à peine celui de lire, encore me faut-il quelquechose
de facile, d'éloigné de tout ce qui m'a occupé ces derniers
temps.
Il y a ces moments un peu lourds à venir qui pèsent
sur moi, les cadeaux à acheter encore, les préparatifs, les fêtes
de famille à passer, ce seront je le sais des moments ambivalents où
se mêlent intimement plaisir et gêne, contentement et ennui.
Puis
il y aura quelques brèves journées à la montagne. Trop brèves.
En fait c'est de ça dont j'ai envie surtout, envie d'être ailleurs,
loin d'ici, loin de la ville, loin des boutiques, loin de l'ordinateur
Ailleurs.
Je
plane dans une espèce de vaste fatigue qui me prive d'énergie, même
de l'énergie pour faire ce qui me plait.
Est-ce que je suis mal ? Même
pas.
Ni gai, ni triste, apathique, fatigué...
Je baille, j'ai même
les yeux qui clignotent, résultat de plusieurs nuits de mauvais sommeil
avec des réveils intempestifs à trois heures du matin sans pouvoir
me rendormir.
Aller je ne vais pas me forcer. Je vais éteindre
l'ordinateur. Je vais m'allonger sur mon lit en attendant l'heure du dîner.
Je vais prendre un bon bouquin facile et qui fait voyager dans la tête.
Tiens
je vais prendre ce brave Potter, je vais attaquer le troisième tome. J'ai
lu avec plaisir les deux premiers volumes en anglais il y a quelques semaines.
C'est idéal. C'est une langue facile, j'arrive à lire sans difficulté
sans avoir recours au dictionnaire. Ça rajoute un petit plaisir de satisfaction
personnelle. Et un peu plus d'exotisme encore, à l'exotisme de l'ambiance
d'une public school anglaise délicieusement mâtinée de sorcellerie
s'ajoute l'exotisme des mots eux-mêmes. C'est encore une façon de
voyager.
Á plus tard !
Retour au haut de page
20/12/03
: Pluvieux partout :
Sinistrose de sinistrose !
Paris
noyé de pluie, de vent. Et le jour qui baisse déjà. Les garçons
sont partis en bande voir le dernier volet du Seigneur des Anneaux. Constance
dort. Je voulais sortir, me bouger un peu. J'ai du mal à mettre le nez
dehors. Il y a des expos, des films que j'ai envie de voir pourtant mais je n'ai
pas envie de sortir par ce temps détestable, pas envie de marcher, encore
moins de prendre le vélo, pas envie de m'entasser dans un bus ou un métro.
Pas envie non plus de faire la queue à une entrée d'expo. Il n'y
a rien qui me dise dans les films à proximité immédiate de
la maison. Quant aux boutiques de Noël on a déjà donné
ce matin, merci !
Alors voilà j'ouvre l'ordinateur malgré
mes déclarations d'hier et mes envies d'ailleurs, je me laisse aller à
ma flemme, ça va être l'occasion d'aller refaire un tour chez les
diaristes, de papillonner, d'écrire un peu peut-être. C'est la perfidie
d'internet ça aussi, cette facilité que l'on a à se mettre
quelquechose sous la dent pour occuper le terrain, remplir le vide sans avoir
à décider, à se motiver, à agir, à se bouger.
Comme la télé pour beaucoup d'ailleurs...
Quelques heures
plus tard je reprends le clavier.
Donc j'ai fait mon petit tour internautique.
J'ai même été sur le forum de la CEV. Je suis un peu stupéfait
de la violence que prennent certains échanges. Je suis déçu
que les discussions qui s'amorcent s'étouffent très vite dans les
lazzis des uns et des autres. Cela ne m'a pas donné envie de m'éterniser
et je suis donc sorti finalement dans la vraie rue, dans la vraie vie, sous la
vraie pluie.
La foule dans les rues, l'embouteillage autour de la place,
les gens qui sortent du centre commercial les bras chargés de paquets,
la pluie fine et persistante qui continue. Je ne me sens pas très à
l'aise dans tout ça
Dans le métro autre ambiance qui
contraste avec la frénésie consommatrice mais ce n'est pas mieux,
les gens indifférents qui voyagent sans se regarder, des pauvres types
qui picolent sur des bancs, dans la rame que j'emprunte il y un vieux gars qui
joue de l'accordéon, très mal, en fait il est bourré, il
passe entre les gens avec sa sébile, je ne donne pas la pièce que
j'avais dans la main. Il descend du wagon en grognant. Tout de suite je regrette
mais c'est trop tard. Je donne plus facilement à quelqu'un qui joue correctement,
qui se présente bien, qui à l'air sage donc à quelqu'un qui
est moins mal, qui se débrouille mieux, qui en fait à sans doute
moins besoin d'un regard, d'un sourire, d'un encouragement, d'une pièce.
Comme si je donnais en fonction d'une prestation, comme si je payais un service
en fonction de la qualité de ce service alors qu'il ne s'agit évidemment
pas de ça !
J'ai été voir " Mystic River ".
Pas mal, assez prenant, un peu lourd quand même, assez glauque en tout cas,
ce n'est pas ce genre de film qui donne la frite, qui fait se sentir plus léger
en sortant
Et il pleut toujours avec la nuit en prime. Je me balade
un peu quand même dans ce quartier que je connais peu. Il y a des passages
couverts, pratiques pour déambuler par ce temps, passage du Prado, passage
Brady. Petites échoppes, marchands de tissus, épiceries bazar orientales,
coiffeurs en quantité à 6 euros la coupe, cafés d'hommes
occupés à jouer aux cartes, à discuter, à fumer. On
est loin tout à coup du Paris miroitant préparant les fêtes
comme de l'Amérique glauque de Mystic River. On ne profite pas assez d'être
touriste à Paris.
Tout ça l'un dans l'autre est assez pluvieux,
en moi et dans le ciel
Retour au haut
de page
24/12/03 : Dernières
heures de l'Avent :
Décidément il me semble
que d'année en année je vis moins bien ces jours de l'Avent. Mon
vrai cadeau de Noël, ce serait d'être loin de tout cela, loin des foules,
de marcher dans un désert sous un ciel pur, le long d'une mer lointaine
ou de crapahuter dans des montagnes face à la beauté du monde, là
où elle est encore préservée. Il faudra vraiment y penser
une autre année.
Est-ce simplement manque de simplicité,
habitude perverse de tout interroger, de tout analyser ? Mais tout, presque, dans
cette période m'éprouve :
Ainsi, ces contrastes entre l'abondance,
que dis-je l'abondance, la surabondance, l'étalage indécent de nos
colifichets et la pauvreté, la misère à nos portes et combien
plus si l'on ose regarder un peu plus loin, sortir de notre hexagone privilégié
Ainsi,
cette foule trop présente partout, pressée, acharnée, les
magasins envahis, les embouteillages pires que d'habitude
Ainsi, ce
rituel des cadeaux à faire et des cadeaux à recevoir, et les contradictions
que j'ai par rapport à cela, mon non désir d'entrer dans ce rituel
en même temps que ma frustration si je devais m'en trouver exclu
Ainsi,
cette injonction sociale généralisée à se sentir bien,
joyeux qui fait ressortir d'autant plus les faiblesses, les blessures, les tristesses
que l'on peut avoir en soi
A moins que le malaise ne vienne plus profondément
de cette incapacité à retrouver l'état d'enfance, de cette
angoisse de l'avoir perdu à tout jamais qui se fait un peu plus cruelle
chaque année. Je me souviens comme nous comptions les jours, comme l'attente
était longue et impatiente et comme était magique le matin de Noël,
le sapin était installé la nuit par mes parents et mes grands-parents
pendant que nous dormions, nous le découvrions le matin entouré
de tous les paquets. En nous levant, avant même d'ouvrir la porte du salon
et d'entrer dans la pièce sombre seulement éclairé par la
lueur des guirlandes du sapin, nous en sentions l'odeur. Ah, je me souviens de
l'odeur du sapin ! Une odeur perdue! Est-ce que les sapins ne sentent plus ? Est-ce
parce que les nouvelles variétés que l'on vend aujourd'hui bien
brillantes, bien vertes, qui ne perdent pas leurs aiguilles, sentent objectivement
moins ou est-ce parce qu'on a perdu un peu de notre capacité à sentir
?
Le côté religieux n'a jamais été présent
chez nous. Je suis un vieux mécréant mais je reconnais qu'inscrire
tout cela dans une tradition qui nous dépasse, que communier dans la naissance
du fils de Dieu, dans la bonne nouvelle, doit donner un autre sens à ces
journées. Un souvenir me revient tout à coup, un très vieux
souvenir, je ne me rappelle pas de quand ça date, qu'elles étaient
les circonstances, toujours est-il que je m'étais retrouvé à
passer la soirée de Noël à Paris, complètement seul.
J'avais marché un peu dans la nuit, je ne sais plus trop dans quel but,
humer un peu l'ambiance ou retourner le couteau dans la plaie de ma solitude
Je m'étais arrêté devant l'église Saint Médard,
les gens arrivaient pour la messe de minuit, une vraie messe de minuit à
l'heure réelle et pas à cinq ou six heures du soir comme ça
se fait beaucoup maintenant pour ne pas perturber les plus païennes célébrations
autour des cadeaux, de la dinde et du sapin. Le porche était largement
ouvert sur un intérieur brillamment éclairé, une chorale
déjà chantait, j'ai senti une brutale tristesse à ne pas
en être, à ne pas pouvoir en être. J'ai failli rentrer dans
l'église mais je ne l'ai pas fait par pudeur, par timidité, par
crainte de me sentir encore plus mal à être simple spectateur parmi
des gens qui participent. Cette station sans doute n'a pas duré cinq minutes
mais de toute cette soirée tristounette c'est de cela seulement que je
me souviens.
Pour le moment je suis seul à la maison. Constance est
partie en avant-garde chez sa mère pour l'aider dans les préparatifs.
Bilbo est au ciné avec des copains. Et Taupin passe en ce moment même
son permis de conduire. Pourvu qu'il l'aie, ce serait vraiment un beau cadeau
de Noël pour lui (et accessoirement un beau cadeau pour mon portefeuille
!). Je jouis de ma tranquillité et j'écris avec plaisir.
On
a passé quelques bons moments aussi ces jours-ci:
On a vu l'exposition
Vuillard. Il y a bien eu encore
et toujours pour ce genre d'exposition les attentes, la queue, la foule
comment arriver à rentrer en communication avec les toiles lorsqu'on doit
tendre le cou et jouer des coudes pour apercevoir les tableaux ? En fait ce sont
les premiers moments qui sont durs, ensuite, si l'expo est suffisamment forte,
on arrive à faire à peu près abstraction des conditions et
à prendre son plaisir. Je connaissais peu ce peintre, il y a vraiment des
choses superbes, étonnantes dans leur variété: Ainsi dans
sa première période les matières chaudes, tranchées
à l'intense luminosité que les reproductions ne rendent jamais comme
dans cet "autoportrait au canotier" ou plus encore dans ce superbe profil
de la "Grand-Mère Michaud", ainsi le jeu étonnant sur
les stries et les moires des tissus et des tapisseries dans les scènes
d'intérieur comme dans l'impressionnant " la mère et la soeur
de l'artiste", ou dans "le prétendant", ainsi la douceur
extrême des coloris et la suavité de la composition dans "le
corsage rayé", ainsi le mouvement plein de grâce et la richesse
d'anecdotes, comme dans une mini bande dessinée, du paravent montrant la
place Vintimille vu de sa fenêtre
Quelques uns parmi beaucoup d'autres
tableaux magnifiques.
On a aussi été voir " Love actually
" au cinéma. J'y allais avec une certaine méfiance après
la lecture des critiques. Mais quel plaisir ! Évidemment on peut trouver
à ce genre de film toutes les limites que l'on veut, c'est facile, c'est
à l'eau de rose, c'est du romanesque de midinette. Mais enfin c'est rythmé,
bien construit, on ne s'ennuie jamais, on sourit souvent, on rit parfois et même
on peut se laisser aller à un peu d'émotion, les acteurs sont superbes.
Bien sûr ce film ne marquera pas le cinéma et ne laissera pas en
nous des traces indélébiles. Mais enfin pourquoi bouderait-on son
simple plaisir de l'instant, pourquoi ne se laisserait-on pas aller à l'émotion
facile, pourquoi n'aurions pas nous aussi droit à notre petit conte de
Noël ? En tout cas ça m'a fait du bien et à Constance aussi
qui est sortie de là toute réjouie. Finalement c'est l'un des rares
moments de ces derniers jours où je me suis un peu laissé aller
à l'esprit de Noël, où j'ai un peu retrouvé cette part
d'enfance dont j'ai si souvent le sentiment qu'elle me fait défaut.
Je
vais mettre cela en ligne puis me préparer tranquillement J'irais tout
à l'heure chez Papa, nous irons ensemble à la fête, les garçons
nous rejoindront un peu plus tard par le RER
Allons, je sais bien
que le moment, tout de même, sera agréable, toute réserves
faites, et qu'il vaut mieux cela sûrement que la solitude non choisie à
laquelle tant d'hommes et de femmes sont condamnés.
Retour au haut de page
26/12/03
: Dispersion assumée :
Je m'étais assoupi
en tout début de nuit. Je m'éveille. De la conscience brumeuse,
floue, sans aspérité du demi sommeil, je sens que je glisse peu
à peu dans la conscience affûtée et excitée de l'esprit
dans lequel la machinerie des pensées se met en branle.
Ce n'est
pas très agréable, ce n'est pas comme ça en tout cas que
je vais me rendormir paisiblement et rapidement.
Sans doute faudrait-il
chasser ces pensées importunes soit en prenant un livre, soit en mettant
le casque pour écouter tout doucement une musique apaisante, soit en m'efforçant,
comme le recommanderait le professeur de yoga, de me concentrer sur mes sensations
corporelles, mes rythmes, mon souffle.
Mais je n'en ai pas envie. J'ai envie
au contraire d'accueillir toutes les pensées qui viennent, de les laisser
se développer, s'entrechoquer, s'opposer, même si c'est épuisant,
même si ça me met à mal parce que rien ne se dessine avec
clarté, parce qu'aucune ligne directrice ne s'impose, parce que je suis
dans la confusion.
J'assume.
J'allume, je prends mon stylo et mon
petit cahier de notes sur le vif non pas pour tenter de synthétiser, non
pour tenter de faire des choix, de décider d'orientations à prendre,
juste pour tenter de réguler un peu tout ce qui se presse en foule dans
ma tête.
L'allusion au yoga n'est pas venue gratuitement. C'est une
des directions dans lesquelles je pourrais aller. J'ai dit déjà
que je n'arrivais pas du tout à pratiquer en dehors de l'heure et demie
que j'y consacre avec le groupe. Ce n'est pas surprenant. Je sais qu'une pratique
personnelle, si elle est authentique et même si on ne lui consacre qu'un
temps limité, disons dix minutes par jour, engage bien au-delà de
ces dix minutes, elle engage au rassemblement de soi, elle invite aux ruptures
avec quantité d'occupations, de perturbations, de dispersions. Ça
n'a rien à voir avec dix minutes de gymnastique hygiénique, ce n'est
pas une occupation de plus à mettre à son programme de journée
surchargée.
Or par ailleurs j'ai tant de choses à faire, à
tester, à expérimenter et peut-être à approfondir,
je voudrais développer ce qui s'offre à moi sans écarter
à priori aucune piste, tenter d'actualiser des potentialités que
je découvre à plusieurs niveaux de ma vie intellectuelle et affective.
Je veux lire ces livres qui s'accumulent sur mes étagères,
aller voir les films et les spectacles dont les affiches m'allèchent, écouter
ces disques que j'ai reçus en présent, les écouter, oui les
écouter vraiment assis dans un fauteuil ou allongé sur mon lit,
pas dans la confusion avec d'autres activités, pas comme un simple décor
sonore pendant que je suis occupé à autre chose.
Je veux
développer tout ce qui tourne autour de mon rapport à l'écriture
et qui est très loin de se limiter à ce que j'écris ici ou
même à tout ce que je pourrais développer autour du diarisme
(lire, écrire, analyser, participer, rencontrer, animer
). Il y a
quantité de pistes plus ou moins complémentaires, plus ou moins
contradictoires qui me viennent à l'esprit et sur lesquelles il ne s'agit
pas seulement de réfléchir, qu'il faut expérimenter pour
savoir où elles mènent, si elles peuvent contribuer à m'aider
à relancer ma vie, à m'offrir de nouveaux terrains d'épanouissement.
Je
veux clarifier mes rapports de couple, faut-il tenter de le raviver en m'en donnant
les moyens (écouter, parler, entraîner, chercher à multiplier
les richesses partagées) ou faut-il le laisser se nécroser de plus
en plus, en me tournant plus vers moi-même dans ma solitude et/ou en cherchant
à développer de nouveaux liens, à m'ouvrir de nouveaux horizons
relationnels.
Toutes ces pistes à creuser elles le sont dans le temps
qui est réellement mien c'est à dire dans des journées de
24 heures, amputées du temps professionnel obligé (et des scories
qu'il porte avec lui en dehors même du temps de travail), du temps des matérialités
(courses, cuisine, bouffe), du temps des socialités obligées, du
temps du sommeil
Il est normal alors que je me sente dispersé,
que j'aie le sentiment d'une course infernale dans plusieurs directions à
la fois avec ce qu'elle porte d'insécurité et de mal-être.
Il
faut que je tente de suivre encore un moment tout ces fils.
De la même
façon que cette nuit j'ai préféré rallumer, prendre
mon stylo, tenté de suivre mes idées tourbillonnantes et dispersées
plutôt que d'essayer de me recentrer pour chercher l'apaisement et le sommeil...
Mais
c'est vrai, à un moment donné, il faudra quand même tailler
dans tout ça, il faudra choisir, il faudra me recentrer.
Sans doute
sans trop attendre.
Le seul mauvais choix c'est de ne pas choisir,
disent-elles. Elles ont raison
Et d'ailleurs l'incapacité
à choisir est certainement un de mes problèmes récurrents.
Mais
assez de tout cela pour le moment. Demain matin nous partons à la montagne
pour quelques jours. Pour un grand bol d'air, de nature, de marche, de ski et
sans connexion, sans ordinateur, juste avec quelques livres et mon cahier quand
même pour écrire si l'envie m'en vient.
Alors à bientôt,
à ceux et celles que je lis, à ceux et celles qui me lisent. Et
bonne année à tous.
Retour au haut de page
27/12/03
: Mauvaise insomnie :
Mauvaise insomnie cette nuit.
Éveillé
à deux heures, je n'ai pas encore retrouvé le sommeil à cinq
heures passées.
Pensées tourbillonnantes, c'est l'agitation
du mental dans ce qu'elle a de pire, pensées qui se pressent dans un climat
détestable, dans le malaise, dans l'angoisse, dans la terreur du temps
qui passe. Rien à voir ave l'insomnie positive de la veille.
J'ai
allumé voulant tenter d'écrire pour discipliner mes pensées,
tenter de les orienter dans un sens plus positif.
Rien à faire. Je n'ai
pas pu.
Á quoi ça sert tout ça, toutes ces pensées,
toutes ces questions, toutes ces écritures, toutes ces résolutions,
tous ces volontarismes qui ne sont finalement que des velléités
n'aboutissant à rien ? Á quoi riment tous ces acharnements ?
Il
faudrait entrer enfin dans un certain laisser-aller, dans le lâcher-prise,
dans l'acceptation.
J'en suis loin.
Je n'ai pas en tête exactement
ce que j'avais écrit il y a dix ans, il y a cinq ans dans de semblables
occasions de fin d'année où l'on tend à faire des bilans,
à poser des résolutions, mais je suis convaincu que c'est à
peu de choses près ce que je pourrais écrire aujourd'hui. Les choses
ne changent pas ou si peu !
La seule chose assurée est que je vieillis
! Chaque année forcément les perspectives se restreignent, les possibles
se réduisent. Certains signes physiques ne trompent pas, ils s'imposent
à moi, je ne peux pas ne pas les voir et pendant des nuits comme celles-ci
il n'y a qu'eux, ils m'envahissent, ils teintent toutes mes pensées d'une
ombre maléfique.
Á défaut d'écrire, pour fuir,
j'ai alors tenté de lire. Sans plus de succès.
Plus je veux
tenter de dormir, plus je m'éveille.
Impossible de prendre un somnifère.
Nous partons tout à l'heure. Je ne veux pas être plus vaseux que
je le serais déjà sous le simple effet du manque de sommeil
L'envie
même de partir, si forte pourtant jusque là, semble s'être
dissoute dans la mauvaise insomnie.
Je ne sais plus que faire. J'écris
ces lignes finalement. M'exaspèrent-elles un peu plus ? M'apaisent-elles
? Je ne sais pas.
Dormir
Retour au haut de page
28/12/03
: De la pluie à la neige :
Hier le voyage
s'est fait, banalement, dans cette migration vacancière obligée
au milieu de tous les autres, par un sale temps venteux et pluvieux, avec des
embouteillages interminables mais enfin nous sommes " bien " arrivés
comme on dit.
L'endroit n'est pas très folichon à priori.
Nous sommes dans une petite station de moyenne montagne que nous ne connaissions
pas. Nous avons loué un minuscule chalet : espace rentabilisé au
maximum avec canapé lit que l'on déplie dans la pièce principale
après avoir poussé la table du repas. Et même pas une lampe
de chevet par personne, mauvais ça pour un insomniaque comme moi ! Le temps
est trop doux pour l'instant, le peu de neige qu'il y avait est en train de fondre
sous la pluie.
Pourtant je ne me sens pas mal, j'aime être dans un
endroit nouveau, quel qu'il soit, pour sa nouveauté même, pour le
plaisir de la découverte.
Ce matin Constance et moi avons vaqué
à notre organisation ici, nous avons fait les courses indispensables, nous
avons été cherché des médicaments à quinze
kilomètres, à la plus proche pharmacie pour le pauvre Bilbo qui
commence ses vacances par une méchante bouffée de fièvre.
Taupin est parti tôt par une navette qui mène à une station
proche un peu plus élevée on l'on peut skier.
Dans l'après-midi
le temps s'est refroidi. La pluie s'est transformée en neige. Là
tout devient différent, là renaissent des bonheurs enfantins, cette
magie des flocons qui tourbillonnent, le sol qui se couvre de neige toute fraîche,
les arbres qui se dentellent de blanc, les sons qui s'assourdissent.
Nous
sortons. Nous marchons. Plaisir de cette première sortie sous la neige.
Je me sens bien, simplement. Enfin!
Retour au haut de page
29/12/03 : Rêve doux :
Je
me suis éveillé ce matin sur un rêve bien doux.
J'ai
rêvé de Viviane. Nous nous retrouvions dans un lieu qui n'était
ni chez elle, ni chez moi, un lieu de vacances sans doute. Tout paraissait aller
de soi, comme une évidence. J'étais simplement ennuyé parce
que Constance, partie se promener, allait rentrer bientôt mais cela ne me
gênait pas plus que ça, il n'y avait ni peur, ni angoisse, ni culpabilité.
Nous nous sentions bien l'un avec l'autre. Nous nous couchions sur le lit et échangions
des tendresses. Viviane restait habillée et me disait qu'elle n'avait pas
envie de faire l'amour. Cela ne me gênait pas, nous continuions à
échanger des caresses et à nous embrasser. C'était simple,
doux, calme, évident
Je me suis senti plein de bonheur à
mon réveil, avec juste un peu de mélancolie, avec le regret de n'avoir
jamais su dire à Viviane ce que j'avais fugitivement ressenti pour elle,
fugitivement peut-être, mais avec assez de force tout de même pour
que bien des mois plus tard elle revienne occuper un petit moment d'une de mes
nuits.
Retour au haut de page
31/12/03
: Fin d'année :
Il n'y a pas de doute, je
ressens le vieillissement. Évidemment le vieillissement est de tous les
jours, je le sais bien mais il y a des moments où il se fait plus sensible.
Nous avons fait deux grandes randonnées en raquette, j'ai eu l'impression
de traîner la patte, de manquer de souffle dans les montées un peu
raides, j'ai des douleurs dans les chevilles et les genoux.
Bien sûr
je pourrais incriminer le manque de pratique sportive pendant l'année,
ce ne sont pas nos quelques balades dominicales autour de Paris qui peuvent constituer
un entraînement suffisant.
C'est vrai mais avant je n'avais pas plus
d'entraînement, dès que je me retrouvais en montagne, je gambadais,
je filais en tête sans effort, je me sentais à peu près increvable.
J'avais des courbatures le lendemain mais ce n'était que de la bonne fatigue,
celle du corps sollicité avec un peu de brutalité, l'effet de la
remise en route et c'était aussi une jouissance, je savais que ce serait
passager.
Je n'ai pas du tout cette impression aujourd'hui. Je me sens rouillé,
en profondeur, de façon irrémédiable.
Tout cela n'est
pas venu en un seul jour, en une seule année mais il me semble que c'est
la première fois que ça se manifeste de façon aussi tangible.
Sans doute à quarante ans je montais moins vite qu'à trente, je
me fatiguais plus rapidement, mais sans en avoir un quelconque désagrément,
sans même en avoir conscience.
J'ai profité tout de même
de ces deux belles journées mais la pénibilité des efforts
à fournir, la conscience surtout de ce dont elle était le signe
ont un peu terni le plaisir que j'ai pris. J'étais content mais je n'étais
pas dans la pure allégresse, dans la légèreté du moment
vécu sans arrière pensée.
Je vois mes fils tellement
pleins d'énergie juvénile ! Ils partent par la navette le matin
à neuf heures, ils surfent toute la journée, s'arrêtant à
peine pour pique-niquer, ils rentrent à cinq heures, toujours toniques,
après un copieux goûter Taupin est encore capable de se mettre avec
entrain dans ses cours et ses problèmes de maths et de physique. Ils sont
bien mes gars ! C'est un plaisir de les voir en si bonne forme physique, si pleins
de joie de vivre, s'entendant merveilleusement, il y a entre eux une constante
complicité joueuse qui fait plaisir à voir. Il y a tant d'adolescences
difficiles, conflictuelles, dramatiques parfois que je ne devrais être qu'admiratifs
et ravis à les voir ainsi. Je le suis mais je ne peux m'empêcher
de ressentir aussi une pointe d'amertume parce que ils sont aussi ce que je ne
serais plus.
Trente et un décembre, encore un basculement d'année
à laquelle on s'apprête, encore un rite auquel nous allons sacrifier,
bon repas, champagne obligé
Ce sera un plaisir, pas question de le
bouder.
Mais tout de même quand j'étais gamin et même
adolescent, je regardais vers l'an 2000, cette borne du siècle, du millénaire,
c'était si loin, je me disais, je serais vieux alors. Et voilà,
nous allons attaquer 2004, je ne suis pas vieux, non, mais ça vient, ça
vient
Allons, pas trop de projets, pas trop de résolutions
pour cette année nouvelle. Celle-ci peut-être seulement, la plus
simple et la plus difficile : tirer le meilleur de chaque moment qui passe.
Retour au haut de page