LES ÉCHOS DE VALCLAIR

 

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MOIS de SEPTEMBRE 2003 (1° quinzaine)

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03/09/03 : Envie de fuir :

Décidément quelle rentrée ! Je commence seulement à mettre pied à terre, à pouvoir ralentir au bureau où les problèmes de personnels se règlent peu à peu, où l'équipe devient à peu près opérationnelle.

Mon envie majeure quand je sors de là c'est la fuite. Etre ailleurs, être loin, laisser derrière soi toutes ces machineries professionnelles, fonctionnarisées et bureaucratiques, les rôles sociaux, les langues de bois et les hiérarchies, l'espace étouffant, les horizons bornés. Fuir !…

Je ne fuirai pas, je me connais, mais enfin je fuis tout de même en pensée.

Sur mes étagères, posés debout en avant des autres livres, il y a, avec leurs photos de couverture tournées vers moi, " La Terre vue du ciel ", le magnifique bouquin de photos de Yann Atthus-Bertrand, " Ultima Thulé " de Malaurie et " Déserts " de Théodore Monod. Des livres posés là, un peu pour le décor, que d'habitude je vois à peine. Mais je réalise tout à coup ce qu'ils ont en commun et que ce n'est pas un hasard si ce sont ceux-là justement que j'ai mis en exergue. La vie aventureuse, la vie nomade, la terre, le ciel, les éléments, les hommes, bref le voyage, le vrai voyage, pas le tourisme. Un genre de vie que je n'ai pas vécu et que je ne vivrai pas mais qui parfois me fait rêver surtout, comme en ce moment, lorsque mon quotidien urbain et " civilisé " se montre aussi prenant et agressif.

Je bouquine aussi. Ah ce plaisir, le soir, lorsque je peux enfin me dire que j'en ai fini de tout le reste, du bureau comme des tâches matérielles et familiales à la maison, de me glisser entre mes draps, de tirer mes rideaux intérieurs, de me plonger dans un bouquin. En ce moment ce sont plutôt des livres qui m'amènent ailleurs. J'ai terminé le Waverley de Scott (dont la fin d'ailleurs est bien décevante, une happy end très conventionnelle et plutôt interminable, on n'est plus au milieu des fêtes et des combats des Highlanders du 18°siècle, dans les paysages tourmentés des hautes terres d'Écosse, on n'est plus dans ce qui justement faisait voyager). Maintenant je me laisse transporter dans la gentille sorcellerie des Harry Potter. Je lis ça en anglais un peu pour me donner un prétexte. En tout cas, pour le moment, ça m'amuse et me délasse.

Je fais une crise de technophobie ! Mon ordinateur n'est toujours pas vraiment réparé, mes tentatives ce week-end n'ont rien donné, il marche plus ou moins, avec lenteur et surtout de façon fantasque et les connexions internet ne sont toujours pas rétablies. Les docteurs consultés n'y comprennent rien, Free est injoignable, les appels répétés tombent dans le vide, plus exactement, ce qui est pire, sur des répondeurs aux voix mielleuses qui souhaitent la bienvenue et annoncent l'impossibilité de joindre un technicien compte tenu " du très grand nombre d'appels " ! J'ai eu quelques envies, restées heureusement purement fantasmatiques, de fracasser cette machine infernale contre le mur ou de la balancer par la fenêtre. Rien de plus exaspérant qu'une machine qui résiste, qui oppose son implacable inertie à toutes les tentatives. Parlez-moi du dialogue homme-machine ! Alors pour ce soir je laisse tomber, je ne tente même pas d'aller chatouiller la machine, j'ai repris un brave vieux cahier et j'écris ces mots installé dans mon lit. J'aimerais bien retrouver mon petit monde des diaristes, j'ai l'impression qu'il s'éloigne à la mesure du temps qui passe. Au bureau pourtant j'ai fait quelques clics, comme pour m'assurer que tout cela existait encore, oui, ils sont là, tous mes favoris, et ils ont produit des pages et des pages, une avalanche de pages, quand pourrais-je les lire, est-ce que cela aura sens d'ailleurs, inutile de dire que sur le moment je n'ai même pas eu le temps ne serait-ce que de parcourir les dernières entrées, juste je me suis rassuré, ils sont là, toujours, ce petit monde continue de tourner à l'égal de l'autre !

Allez, pour le moment je retourne vers mes gentils sorciers…

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06/09/03 : Glaçant !

Je m'éveille en sursaut, il est cinq heures et demi du matin, malgré ma flemme et l'envie de me laisser aller à me rendormir, j'allume, je prends mon cahier…

Un rêve comme celui-là il me faut absolument le noter pour ne pas le perdre, bien qu'il n'ait rien d'agréable, c'est le moins qu'on puisse dire !

D'abord je suis à mon travail. L'aspect de mon bureau est très différent de la réalité, en fait je dispose de deux pièces de part et d'autres d'un couloir peint en blanc. D'un côté c'est une vaste pièce bien éclairée par une baie vitrée, normalement équipée et ordonnée et même luxueusement meublée, avec un grand bureau en bois, des sièges visiteurs cossus d'un bleu éblouissant dans un angle, de l'autre côté du couloir il y a une pièce sombre, aux volets fermés aux meubles vieillots et à l'invraisemblable capharnaüm. C'est là que je travaille principalement. La pièce attend des travaux, elle est en partie dallée, en partie de terre battue, un monticule de sable en occupe une partie, il y a un bureau, des piles de dossiers partout, une machine à écrire, des petites figurines jouets en quantité. Je m'aperçois qu'il y a de l'humidité dans le couloir, la peinture toute neuve commence à s'écailler et même il y a des gouttes qui tombent du plafond. Je cherche sans les trouver les paperasses nécessaires pour déclarer le sinistre et faire venir des réparateurs. Une des secrétaires du service passe, c'est très précisément L., une secrétaire qui était effectivement en poste à mon bureau l'an dernier et qui a obtenue une mutation, elle passe mais n'a pas l'air décidé à m'aider en quoi que ce soit, elle a même déplacé la machine à écrire au milieu du table de sable, je lui dis que c'est idiot mais elle me fait bien voir qu'elle n'a rien à faire de mes remarques. Je m'avise que puisqu'il y a une fuite qui vient du dessus, il faudrait que je téléphone à l'occupant de l'étage au-dessus, on est vendredi après-midi, je pense qu'il n'y aura plus personne, en plus je ne trouve pas le numéro, et je ne trouve même pas le téléphone dans le fouillis du bureau, je déplace meuble et piles de dossiers, rien à faire…

Changement de décor, je n'ai pas souvenir de la façon dont s'est effectuée la transition entre les deux parties du rêve. Je suis installé sur un lit dans une pièce mansardée qui évoque une maison de campagne, Constance est à côté de moi, sa maman est là aussi, elle est venue nous rendre visite, elle est assise sur le lit. On parle de Papa, il est parti en voyage, il avait des soucis de santé, il faudrait prendre des nouvelles, la maman de Constance me reproche de ne pas le faire. Puis il y a la voix de Papa, paisible, très claire, mais dont je me dis tout de suite que c'est une voix d'outre-tombe. Je ne me souviens pas de ce qu'il dit mais c'est lui incontestablement, bien reconnaissable par son accent caractéristique. Je cherche d'où vient la voix, du plafond, d'une poutre plus précisément dirait-on. Je dis : " Papa, tu es là, dans la poutre ? " Il ne répond pas. Je suis inquiet, je me demande s'il est mort. La maman de Constance ne semble pas en douter, elle arbore un vague sourire un peu triste comme si cette apparition confortait sa foi en Dieu et en une vie après la mort.

Mais voici que Papa apparaît, en face de nous, comme surgi du néant, il approche lentement sans pourtant sembler marcher, comme glissant dans l'air, son visage est paisible, un peu figé, il ne parle pas, il a des traits d'un homme encore jeune, c'est son visage d'il y a vingt ans. C'est un fantôme, c'est une évidence et je m'étonne dans mon rêve de n'être pas plus troublé et effrayé. Mais il est allongé maintenant sur le lit à côté de nous, ses traits se sont transformés, il m'évoque de plus en plus un squelette sans en être un pourtant, je vois ses dents plutôt que sa bouche et son visage, je vois ses doigts qui semblent se transformer en griffes ou en serres plutôt que ses mains ou ses bras. Veut-il m'emmener, vient-il me chercher ? Tout cela se fait menaçant et pourtant je n'ai pas peur car je sais parfaitement que tout ceci est une apparition et que les apparitions ça n'existe pas.

N'empêche c'est sur cette image que je m'éveille, non pas dans la terreur mais avec, on s'en doute, des sensations très désagréables.

Papa est en voyage justement. Il est parti chez des amis pour une semaine dans les Alpes. Je m'étais dit hier justement qu'il fallait que je l'appelle pour prendre de ses nouvelles. Je ne suis pas superstitieux mais je crois que quand je vais le faire tout à l'heure je ne pourrais m'empêcher d'avoir une toute petite pointe d'inquiétude avant qu'il ne décroche et que j'entende sa voix.

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06/09/03 bis: Connecté, peut-être ?

Cet après-midi j'ai réussi à me reconnecter ! Tout n'est pas réparé pour autant. Manifestement mon ordinateur a attrapé de méchantes bestioles, les dégâts de Blaster sont réparés mais Norton a trouvé autre chose qu'il ne parvient pas à éliminer et moi non plus. La machine fonctionne de façon erratique, à peu près correctement à certains moments, très mal à d'autres, je passe sur les diverses considérations techniques, les docteurs consultés n'y comprennent rien, en tout cas la connexion est rarement opérationnelle, si elle l'est elle ne le reste pas longtemps.

A la prochaine fenêtre favorable je vais essayer d'actualiser mon site et de mettre enfin en ligne mes entrées de cet été. Cela marchera peut-être ou peut-être pas ou peut-être à moitié. En tout cas j'écris ces quelques lignes que j'espère pouvoir transférer pour dire que j'ai bien l'intention de revenir et de continuer cette expérience de diariste.

Peut-être vais-je employer les grands moyens pour refaire fonctionner correctement cette machine infernale: reformatage du disque dur et réinstallation de tout le système. Je frémis à l'idée de me lancer dans de telles aventures, j'imagine tous les incidents possibles entre sauvegardes oubliées et difficultés de réinstallation. Mais enfin ce sera peut-être la seule solution. Donc peut-être une nouvelle éclipse !

Pendant ce bref temps où j'ai pu me reconnecter la seule chose que j'ai eu le temps de voir c'est que la Cev s'arrêtait, j'imagine que cela va faire jaser dans le Landerneau des diaristes !

Et puis, à propos, j'ai téléphoné à Papa, il est en pleine forme, il randonne en montagne et s'en donne à coeur joie. Ça c'est le bonheur des retraités d'être en vacances quand tout le monde bosse !

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09/09/03 : Retour chez les diaristes :

Bon, la rentrée se fait cahin-caha. Chacun trouve ses marques pour cette nouvelle année scolaire. Après un début vraiment difficile quelques modifications sont intervenues dans mon équipe. J'ai l'impression que ces arrivées devraient, passé une phase d'adaptation, nous aider à améliorer notre fonctionnement et devraient donc me rendre la vie plus facile. Touchons du bois ! Constance aussi a l'air contente de ses nouvelles conditions de travail. Et ça va pour les grands gars aussi : Bilbo aborde le lycée, il est tout content du changement et n'a pas l'air de s'affoler malgré le rythme et le niveau de son lycée censé être très exigeant. Taupin remet ça pour une année, c'est lui qui tire le plus la patte, il savait parfaitement à quoi s'attendre évidemment, c'était son choix de reprendre pour essayer de décrocher une école plus prestigieuse mais maintenant que ça redémarre il accuse un peu le coup à rentrer à nouveau dans le tunnel de boulot de ce genre de classe.

Finalement cette année très crainte démarre sous des auspices assez favorables. Pendant mes vacances pourtant je n'étais pas très bien dans l'ensemble. Il me semble que pesaient sur moi toutes sortes de nuages, formés pendant l'année précédente -ma fatigue du boulot, mes relations de plus en plus distantes avec Constance, la conscience du vieillissement rendue plus vive par la mort de Maman, cette impression d'achever un cycle de vie en redoutant celui qui s'amorçait…
Je ne suis pas enthousiaste pour autant. Mais je fais avec, sans excès d'anxiété ou de déprime. La machine est relancée. Je suis sur mes rails. Advienne que pourra.

C'est un paradoxe fréquent chez moi que les moments de temps libre auxquels j'aspire pourtant soient souvent moins bien vécus que les moments de suractivité. C'est le cas notamment lorsque ces temps de " vacances " ne sont pas riches de moments forts, de voyages, d'activités sportives. J'ai besoin de vacances non vacantes !

Je reprends pied peu à peu dans le petit monde des diaristes. On ne peut pas dire que mon ordinateur soit réparé, il se passe toujours des choses bizarres mais enfin le plus souvent j'arrive à peu près à le faire fonctionner et à me connecter. Donc j'ai pu mettre en ligne mes nouvelles entrées, j'ai pu reprendre mes lectures diaristes. J'ai fait à peu près le tour de mes favoris, évidemment je parcours plutôt que je ne lis, les productions de l'été des uns et des autres étant parfois assez considérables. J'ouvre aussi, en suivant des liens, des pages qui m'étaient encore inconnues. Ce monde du diarisme, sous ses diverses formes, parait quasi infini, je me rends compte à quel point la bientôt défunte Cev n'est que le sommet de l'iceberg.

Mon impression est un peu mitigée. Je suis content de retrouver certains à travers ce qu'ils écrivent. Je vois ce qu'ils deviennent, comment la vie avance pour eux, c'est un peu comme d'avoir des nouvelles d'amis lointains. Sauf que ce ne sont pas exactement des amis. Ce sont pour moi des figures étranges, au statut indistinct, qui campent sur l'extrême bord de la réalité, à la fois très présentes parce que je connais ou devine sur elles peu à peu beaucoup de choses, certaines que parfois j'ignore de mes propres amis. En même temps ce sont des figures très lointaines quasi abstraites parce qu'il leur manque certains des attributs essentiels de la réalité. Je ne peux m'empêcher alors de me sentir un peu impudique à parcourir ces pages, à pénétrer chez eux, au cœur de leur intimité, au cœur pour certains de douloureuses interrogations. Bien sûr ils m'invitent puisqu'ils ont choisi de mettre tout cela en ligne. Mais il n'empêche, je me sens par moments presque gêné d'être là, par-dessus leur épaule…

L'impression vient sans doute en partie de ce que je lis beaucoup d'un seul coup, que je fais défiler les jours et les semaines, que j'aborde X puis Y puis Z dans la foulée. Mais du coup cela questionne l'ensemble de la pratique, même celle des moments où je fais cela légèrement, une petite entrée par ci, un coup d'œil par là…

Et je m'interroge en parallèle sur ce que moi je donne à lire. Je me sens impudique à lire les autres, combien plus alors je le suis à me donner moi même aux regards des autres, à déballer mes états d'âme et surtout à évoquer ceux qui m'entourent !
Cela vient de ce qu'il y a dans ce que j'écris plusieurs fonctions :

· C'est un aide mémoire, j'écris pour pouvoir retrouver certaines choses, des moments, des lieux, des lectures. J'ai besoin là de certaines précisions, je dois mettre les noms, je cite des textes, je note les références précises pour pouvoir les retrouver si j'en éprouve le besoin.

· C'est un effort de connaissance pour moi-même, je m'interroge, j'essaie de creuser, j'essaie de me construire à travers ce que je mets à jour. C'est l'introspection classique, j'écris comme peut-être j'aimerais parler à un thérapeute. C'est pourquoi par exemple j'essaie de noter ici certains rêves.

· J'écris pour le plaisir d'écrire, pour la satisfaction que je retire de la page réussie. La page réussie ce n'est pas la "belle" page au sens littéraire, c'est plutôt celle où j'ai l'impression d'avoir réussi à assembler mes mots de façon claire, à exprimer vraiment ce que je voulais dire.

· Enfin, et c'est ce qu'il y a de nouveau depuis que je mets en ligne, j'écris pour communiquer, pour être lu même si c'est par un tout petit nombre, au-delà j'écris pour échanger, pour créer de nouvelles relations fussent-elles épisodiques ou virtuelles.

Or tout cela fait peut-être un peu beaucoup. Ces diverses fonctions ne sont pas toujours compatibles. Les précisions qui me sont nécessaires pour la remémoration peuvent compromettre l'anonymat. L'introspection peut amener à évoquer les autres dans les relations que l'on à avec eux dans des termes désobligeants qu'il conviendrait de garder pour soi. Se rendre agréablement lisible pour autrui peut affadir la spontanéité du propos.

Cela pose bien l'intérêt qu'il peut y avoir à écrire à plusieurs niveaux, à différencier la destination des textes, à en mettre certains en ligne, à en garder d'autres pour soi. Mais je n'ai pas envie de cela. Mon idée de départ c'était bien de rester le plus possible conforme à ma façon d'écrire d'avant, je trouve déjà parfois un peu schizophrène de faire se côtoyer le moi qui écrit et celui qui vit dans le quotidien, j'ai l'impression que ce serait pire si je me lançais dans une écriture avec deux niveaux d'intimité. A travers l'unité de mon écriture, l'intégration dans un même texte des divers aspects que je veux évoquer, il me semble que je cherche aussi à construire mon unité et je récuse donc ce qui contribuerait à me partager. Donc je vais tenter de continuer comme cela mais disons que je me rends compte de façon un peu plus nette qu'avant de certaines contradictions que cela comporte et donc de certains inévitables aménagements que je dois apporter..

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14/09/03 : Nuit agitée :

J'ai affreusement mal dormi cette nuit. Réveillé dès 3 heures j'ai subi ce que j'appelle une insomnie de " trop plein ", moins pénible certes qu'une insomnie d'anxiété comme j'en connais aussi parfois mais désagréable néanmoins et pas très productive : les idées, les projets de toutes sortes se bousculent dans ma tête, se génèrent les uns les autres, se télescopent, entretenant mon excitation et me tenant en éveil. En général au matin tout ceci se dégonfle et les idées qui paraissaient lumineuses au cœur de la nuit se révèlent souvent tortueuses et impraticables.

C'est mon excitation de lecteur qui a déclenché tout cela cette nuit.

J'ai participé l'autre jour pour la première fois à une réunion de lecture de l'Apa. Cette association à laquelle j'adhère depuis quelques années mais jusque là de façon assez passive, se donne pour objectif, entre autres, de collecter et de mettre à disposition de tous la part du patrimoine autobiographique francophone que les auteurs veulent bien lui adresser. Elle reçoit de nombreux textes qui doivent être lus, sommairement indexés et dotés d'une courte note de présentation. C'est à ce travail que j'ai commencé à participer. On s'est retrouvé à quelques uns autour d'une table sur laquelle trônait des piles de documents de toutes formes,de toutes présentations et de toutes provenances. Les textes circulent autour de la table, on les feuillette, on s'en fait une première idée puis on se les répartit, chacun s'efforçant de choisir les documents les plus susceptibles de l'intéresser avec lesquels il repartira en fin de séance. Après cette répartition on évoque les textes qui ont déjà circulé dans le groupe, ceux qui ont rédigé un " écho " le lisent au groupe qui le commente, les tranches de vie se succèdent, foncièrement différentes, c'est un vrai kaléidoscope. La discussion est intéressante, l'ambiance chaleureuse et sympathique. Je sors de là content et je ramène un bon paquet de lectures. Les textes sont là, sur l'étagère à côté de mon lit, ils m'attendent…

Mais en même temps je me suis lancé dans une lecture un peu frénétique à partir du site de la Cev. Il va fermer. Tous ceux qui s'y regroupaient vont s'effacer, plutôt il vont s'enfoncer à nouveau dans les profondeurs du web, ils seront moins faciles à trouver. Alors je me suis lancé dans la tâche un peu folle de jeter au moins un regard rapide sur ceux que je n'avais jamais ouverts, de mettre leur adresse en mémoire pour pouvoir éventuellement les retrouver facilement. Alors je clique à tout va, je parcours des pages et des pages, le plus souvent très en diagonale, mais parfois je m'attarde un peu plus, je me laisse prendre par ma lecture, je me dis que peut-être je suis en train de découvrir une nouvelle perle.

Avant de me lancer dans ma propre mise en ligne, j'avais observé pendant un long moment le monde des diaristes, au départ mes premiers contacts étaient de curiosité, qui sont ces gens qui mettent leur journal en ligne, qu'attendent-ils, que produisent-ils, quel est l'effet de l'interactivité sur leur façon d'écrire, bref un intérêt quasi sociologique et littéraire, un peu comme un prolongement du bouquin de Philippe Lejeune "Cher écran" qui m'avait intéressé. J'avais même commencé à répertorier les sites que je visitais dans un petite base de données, essayant vaguement de percevoir des catégories. J'avais ensuite laisser tomber tout cela à mesure que mon intérêt s'était concentré sur quelques-uns, à mesure aussi que croissait ma propre envie de m'y coller moi-même. J'ai ressorti ma base de données et j'ai recommencé à l'alimenter. De cela ferais-je quelquechose ? Je ne sais et c'est cela justement qui a largement occupé ma nuit avec mon expérience commençante de lecture à l'Apa, comment articuler tout cela, que privilégier, comment trouver le temps de faire tout ce que je voudrais. Sans oublier de vivre. Ce matin il fait beau, je tape ce texte avec plaisir tout en me disant pourtant que j'aurais mieux fait peut-être d'enfourcher mon vélo et de filer au bois ou en bord de Seine.

Je me suis rendormi laborieusement sur le matin. D'un mauvais sommeil, interrompu à plusieurs reprises… Quel cocktail de rêves ! Cauchemardesques dans l'ensemble… Mais j'aime ça quand même, cette imagination fantasque de la nuit qui fait surgir de si improbables images. Je ne me souviens pas de tout. Voici tout de même, au moins des bribes, au moins les images fortes qui sont restées au réveil :

Je suis avec une jeune femme assez jolie, qui ressemble à une de mes collègues de bureau dans un vaste bâtiment, une sorte d'usine. Elle s'installe sur une sorte de table ou de lit qui évoque vaguement ce sur quoi on s'allonge lors d'une consultation médicale. D'ailleurs il y a un homme jeune, bien vêtu, penché sur elle. Le lit se déplace, la jeune femme pénètre jusqu'à mi-corps dans une sorte de machinerie tubulaire (comme un appareil à scanner mais l'évocation médicale ne me vient que maintenant, pas du tout pendant le rêve, il s'agissait vraiment d'un local industriel). L'homme me dit " On la met en faisselle ". Je suis terrorisé. " En faisselle, comme le fromage ??? " " Oui, en faisselle, comme le fromage " me répond l'homme comme si c'était la chose la plus naturelle du monde. J'essaie de retenir la jeune femme. Rien à faire. Elle est happée lentement mais inexorablement. Je lui touche les seins, je les lui pétris, presque avec désespoir, mes mains suivent le mouvement et sont entraînées à leur tour dans l'effrayant appareil mais je sais que je vais pouvoir les retirer, je l'embrasse sur la bouche passionnément, elle me répond par ses lèvres et par son regard, c'est désespérant, je me dis que c'est un amour que nous n'avons pas su voir quand il était temps, que maintenant c'est trop tard…

Je voyage seul en train, il se passe des tas de choses dont je ne me souviens pas, je me retrouve dans un autobus qui roule dans la montagne, c'est un voyage interminable qui donne le sentiment de tourner en rond, de revenir sans cesse sur nos pas, il neige abondamment, on se demande si on va passer, il y a des skieurs nombreux au bord de la route, pourtant il fait nuit, les nuages se déchirent, on aperçoit les parois de grandes montagnes, le jour se lève lentement, le soleil perce par endroits, les couleurs sont magnifiques, le paysage, la lumière, sont d'une grande beauté que je ressens profondément. Je suis descendu du bus dans un village envahi par la neige, devant moi une pente raide qui mène à une terrasse dégagée, je m'avance avec peine, j'ai du mal à grimper, il y a des gens en haut qui ont l'air secourables, je tends la main, un type s'approche, se penche vers moi mais il ne me retient pas, il me retire mes moufles, je retombe en arrière, je brûle mes mains nues en tentant de me retenir dans la neige glacée, le type là-haut me regarde chuter en riant…

Je suis au travail, très occupé, je m'aperçois soudain que dans un des bureaux des collègues prennent le champagne, je n'en avais pas été averti, je m'avance en demandant ce que l'on fête, on ne me répond pas, j'ai l'impression d'une certaine gêne à mon égard. Il y a là certaines collègues avec qui je travaille actuellement, d'autres plus anciennes, une notamment avec qui j'ai été très lié dans ma vie réelle à une époque mais que j'ai complètement perdue de vue. Je suis ravi de la retrouver. Mais l'ambiance est étrange, mi détendue, mi inquiétante. Des gens commencent à partir, certains semblent anxieux, les gens s'embrassent à la porte. Au centre de la pièce ily a un type pas très sympathique, avec qui je parle. Il y a devant lui une figurine de dinosaure en plastique moulé, je m'aperçois qu'elle grossit peu à peu, qu'elle devient vivante et commence à se mouvoir. Un autre animal vivant apparaît, familier celui-là, (un chat ?). Il va nous débarrasser de la bestiole préhistorique qui n'a encore que la taille d'un rat, il l'attaque, semble prendre d'abord le dessus, ça sanguinolle de partout, le dinosaure quoique sérieusement amoché continue de grandir, la situation devient effrayante, tout le monde a peur, seul le type en face continue à sourire bêtement, le dinosaure engloutit d'un seul coup l'autre animal qui n'est plus qu'une boule ensanglantée complètement méconnaissable, claquement sinistre de la mâchoire du monstre qui se referme sur sa proie, tout va de plus en plus vite, quelqu'un porte une assiette avec des morceaux de poulets frits, horreur, ils se mettent à s'agiter à leur tour, les cuisses et les ailes dans le plat semblent à leur tour devenir vivants, le type me tend un paquet vert enveloppé dans un papier de soie, je devine qu'il va en sortir un serpent qui va se jeter sur moi. Il n'en a pas le temps. Je m'éveille en sursaut. Là c'était pour moi le vrai cauchemar, j'ai dans la vie réelle une phobie des serpents…

Brr !

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