LES ÉCHOS DE VALCLAIR

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MOIS de JANVIER 2004 (1°quinzaine)

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01/01/04 : Nouvelle année :

Voilà nous y sommes. Nous avons gentiment festoyé sans excès avec ma belle sœur, mon beau frère et leurs filles qui occupent le chalet à côté du nôtre, la soirée a été agréable, le champagne a coulé à minuit pile, les portables ont tenté d'échanger des messages et des vœux au plus près du moment idoine.

Une nouvelle année.

L'an deux aussi des Échos de Valclair.

Je ne me risque pas au bilan, ni pour l'année écoulée, ni pour cette expérience de journal. Je ne me risque pas plus aux résolutions ou au pronostics.
Simplement, je continue.

Je ne veux pas donner plus d'importance à ce jour qu'il n'en a, je ne veux pas en faire une matrice ou un signe pour l'année qui commence, je sais que ce n'est qu'un jour comme les autres. J'ai envie de dire cependant que la journée a été bonne, vraiment bonne.

Nous sommes montés en ski de fond au petit col qui ferme la vallée. Parcours tranquille et régulier le long d'une route enneigée, pente modeste, à peine plus de deux cent mètres de dénivelée pour trois heures de cheminement jusqu'au col. Peu à peu je retrouve le bon mouvement du fondeur, le pas glissé bien rythmé. J'avais mal à la cheville ce matin mais une fois échauffé je ne sens plus rien, mon souffle est régulier, maîtrisé. Je me sens le plus à l'aise de notre petit groupe, je glisse en tête dans ce paysage immaculé, parmi les arbres festonnés de neige, dans un silence quasi parfait, je m'arrête de temps à autre pour mieux ressentir tout ce qui m'entoure et pour laisser à Constance, à mon beau-frère, à ma belle sœur et à leurs filles le temps de me rejoindre. Nous ne rencontrons personne tout le temps de la montée. Le temps est couvert mais par moments le soleil tente une timide percée…

Je me sens bien, léger, sans ces ombres de malaise qui ont planées sur les randonnées des jours précédents.

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05/01/04 : Reprise :

Oh que Paris est triste sous ce ciel gris et dans cette humidité froide!

Ce matin j'ai retrouvé le chemin du bureau sans enthousiasme, c'est le moins que je puisse dire. J'y suis allé tôt, comme j'aime à le faire en général et particulièrement lors d'une reprise comme celle-ci pour regarder mon courrier, organiser ma semaine, me remettre personnellement dans le bain avant l'arrivée de l'équipe. Il faisait encore nuit noire, je me sentais totalement décalé, à déambuler dans ces locaux vides, à allumer les ordinateurs, à ouvrir les dossiers en attendant les premières arrivées, les commentaires des uns et des autres sur les fêtes et les vacances et les bons vœux rituels. Comme tout cela est loin de moi et pourtant c'est mon quotidien. Mais que faire sinon me remettre dans le moule, retrouver mon personnage, mes gestes, mes mots de professionnel…

Et tout à coup, écrivant cela, une analogie me frappe : je suis dans mon travail comme dans mon couple. Insatisfait parce qu'il manque à l'une comme à l'autre le vrai désir, l'enthousiasme, la passion mais en même temps analysant rationnellement que les choses pourraient être pires, que rien n'est insupportable, qu'il y a, au-delà des routines, des moments agréables et des activités intéressantes et qu'il y a surtout un cadre sécurisant. Il faut croire que la peur du changement est en moi plus forte que l'ennui des routines, puisque je suis là et que j'y reste. Peut-être est-ce bien d'ailleurs, une vie rangée n'est pas en soi négative, il n'y a pas de raison de valoriser plus la nouveauté, le mouvement, le changement permanent, mais alors il faudrait accepter cela, cette vie rangée, l'accepter en profondeur et en toute connaissance de soi, l'accepter positivement et non par résignation.

Nous sommes rentrés samedi soir sans échapper tout à fait aux embouteillages des retours sur Paris. Cela déjà signait le moment ! Je repensais, dans les bouchons à notre dernière journée de ski, si proche, déjà lointaine.

Je suis monté ce dernier jour avec les garçons à l'autre station, située un peu plus haut dans la montagne, donc plus enneigée, là où les pistes de ski de descente ont pu être ouvertes et je me suis efforcé de les suivre dans un rythme tout différent de nos promenades en raquette ou en ski de fond des jours précédents. Le matin il faisait presque beau, mis à part quelques nuages résiduels. En grimpant avec le bus je voyais pour la première fois l'ensemble du paysage de la région où nous sommes, les vallées avec les petits villages comme celui où nous résidions, les forêts sur les premières pentes, les sommets rocheux qui les dominent, tous ces chemins qui zigzaguent de hameaux en hameaux. Comme souvent, je me suis pris d'intérêt pour le pays au moment où je dois partir, j'aurais aimé pouvoir rester encore un peu, explorer un peu plus, glisser sur la neige sur tous ces chemins. L'après-midi les nuages sont revenus et nous ont engloutis, on n'y voyait plus rien, il faisait glacial, nous avons arrêté de skier et nous nous sommes retrouvés, les garçons et moi, autour d'un vin chaud, cela aussi c'était plaisant, c'était un bon moment partagé.

Dimanche j'ai retrouvé l'ordinateur et quelques diaristes que j'ai lus en diagonale. J'ai remis mon site à jour, ouvert une nouvelle année, j'ai retranscrit les quelques notes que j'avais prises sur mon cahier pendant les vacances, sans pouvoir bien sûr m'empêcher d'améliorer les mots et les phrases. Tout cela m'a pris du temps, beaucoup de temps finalement, du temps pas très bien vécu parce que j'avais l'impression de me servir à moi-même du réchauffé, de répéter encore et toujours de mêmes interrogations qui n'ont pas grand sens si elles ne me permettent pas d'avancer et pas grand intérêt pour les autres qui doivent se lasser de mes jérémiades sur le temps qui passe trop vite, j'avais l'impression de stériliser mon présent avec les bribes de mon passé proche… Encore une fois, quoique je veuille, le fantasme d'exhaustivité me taraude, dès que des idées et des mots me traversent, j'ai du mal à les laisser filer, à ne pas tenter de leur donner forme, à ne pas essayer d'en garder trace pour moi plus encore que pour les autres. Ces quelques mots griffonnés pendant les vacances j'aurais pu m'en débarrasser, j'aurais pu laisser à la place une longue plage de silence, un blanc. Je ne l'ai pas pu. Le détachement ce serait peut-être aussi le détachement du besoin de s'écrire (au sens d'écrire le soi ).

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07/01/04 : Juste de la musique :

En rentrant du bureau pas trop tard ce soir mais après une journée éprouvante, je m'étais mis devant l'ordinateur avec plein de choses en tête à écrire, avec l'envie de parler de certains livres que j'ai lus récemment.

Au bout de quelques minutes je me suis senti envahi d'une envie de dormir irrépressible, bâillements à m'en décrocher la mâchoire, yeux clignotants devant l'écran. Je n'ai pas essayé de lutter. J'ai été m'allonger sur mon lit, j'ai ressenti tout de suite une immense détente, j'ai mis un disque, j'ai commencé à écouter. Curieusement je ne me suis pas endormi : allongé, le corps à l'aise, les yeux fermés, cela me suffisait. Je me suis laissé happer tout entier par les notes produites par les doigts magiques, le cœur, l'âme d'Hélène Grimaud. J'écoute Credo. C'est un disque un peu étrange, parce qu'il associe Beethoven et des compositeurs contemporains, Bach aussi puisque le Credo d'Arvo Pärt qui donne son nom à l'ensemble du disque est bâti à partir d'un prélude de Bach. Chaque moment musical est beau dans sa différence mais ce qui est beau surtout c'est de percevoir soudain, grâce à ce choix très personnel qu'a fait Hélène Grimaud en les associant, des correspondances entre ces œuvres qui à priori n'ont rien de commun.

Et puis il y a l'ovale harmonieux de son visage et l'éclat si particulier de son regard sur la photo qui illustre la pochette du disque… Et puis il y a la femme de terre et de forêt, la femme aux loups… Tout cela crée une aura attirante et un peu mystérieuse autour de sa personne que je me plais à essayer de ressentir dans sa façon de jouer.

Et donc j'ai laissé mes écritures. Peut-être reviendrais-je un de ces jours à ces mots que j'avais en tête tout à l'heure. Peut-être pas… Tant pis ? Tant mieux ?

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09/01/04 : Hésitation :

M'imposer le silence.

Me détacher un peu des mots et me rapprocher des choses et des êtres.

Voilà ce qui m'était venu l'autre soir, voilà ce qui était presque une résolution. Je me sentais déterminé à laisser au moins pour un grand moment ce journal de côté. Pas seulement sa mise en ligne qui n'est finalement qu'un aboutissement mais tout le processus qui y conduit : les mots qui me traversent l'esprit dans les diverses activités de ma vie, mes griffonnages d'insomnie, le texte que je tape ensuite dans word, le version papier que je tire et que je consigne dans un tiroir.
Cela m'occupe trop non pas seulement par le temps objectif que j'y consacre, les moments d'écriture proprement dits mais surtout par un espèce de souci quasi permanent des mots qui s'immisce dans ma vie et finit par faire écran à la vie elle-même.

Et puis, et puis, je ne sais pas…

Hier soir je me suis promené chez les diaristes, j'ai jeté un œil sur les forum, j'ai écouté sur internet l'intervention d'une universitaire sur le diarisme en ligne, j'ai modifié un peu mes favoris. Bref je m'y suis remis aussitôt. J'ai même installé un compteur statistique sur mes pages ce qui n'est pas vraiment cohérent avec l'idée de s'arrêter ! En fait j'ai le sentiment pour ce qui est du journal en ligne d'une expérience amorcée mais pas encore suffisamment accomplie et je me sentirais frustré de ne pas aller un peu plus loin. Finalement c'est le fait de mettre en ligne qui préserve l'envie du journal, m'y fais y revenir.

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11/01/04 : Me reprendre :

J'ai plutôt mal démarré l'année. Il faut que je me secoue, que je me reprenne…

Mes doutes actuels sur mon écriture viennent de là. Je la vis comme un refuge, un substitut, un écran à ma vie réelle et non comme une aide et un plaisir.

Facile d'être dans tes mots lointains, occupe toi donc plutôt de ce qui ne va pas dans ton quotidien très proche et très présent, occupe t'en en vrai, au bureau, à la maison, dans ton couple! Ça suffit les questionnements récurrents, les commentaires, les résolutions sur le papier ou dans un petit coin de ta tête, vas-y, bouge, agis…

J'ai passé une semaine calamiteuse au boulot. Il n'y a pas eu de difficultés particulières pourtant. J'ai bien eu quelques déconvenues (auxquelles j'aurais dû m'attendre d'ailleurs, le boulot qu'on m'avait demandé avant les congés et sur lequel je m'étais tellement investi ne suscite quasiment aucun commentaire, tout le monde a l'air de s'en foutre, ce n'est pas vraiment motivant) mais ce n'est pas ça l'important. Je me sens apathique, je peux rester un long moment devant des dossiers sans parvenir à les ouvrir, devant mon téléphone sans composer le numéro, je n'arrive pas à être tonique, à prendre des initiatives, j'attends que les choses me tombent sur la tête pour y faire face. En fait ce n'est pas quand je suis confronté à des difficultés objectives venant de la situation ou des autres que je me sens le plus mal au boulot, c'est plutôt lorsque je me sens moi apathique, inefficace, mauvais comme ces jours-ci parce qu'alors c'est mon estime de moi qui en prend un coup.

Á la maison ce n'est guère mieux. On se croise le plus souvent dans le silence.

Hier samedi quand même on a bougé un peu, on a réussi à échanger un peu au delà du quotidien. On a repris les contacts avec le petit groupe de randonnée dont on s'occupe et qu'on était en train de laisser péricliter. On a parlé sérieusement de nos prochaines vacances et de ce qu'on souhaitait en faire et on a pris les décisions correspondantes. On est sorti ensemble pour aller voir l'exposition Gauguin et on y a pris plaisir. Mais il faudrait aller plus loin. Il faudrait parler vraiment du fond de nos difficultés, de l'état dépressif de Constance, du mien qui a une forme différente, plus soft sûrement, peu visible à l'extérieur mais réel, de notre fatigue de couple, de nos rencontres sensuelles de plus en plus rares. Il y a eu certains moments où je me sentais si loin d'elle que je me disais qu'il ne valait même pas la peine de tenter de parler. Ce n'est pas le cas ces jours-ci. J'ai envie de renouer quelquechose mais nous avons tant de mal l'un et l'autre, chacun derrière nos murs.

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12/01/04 : Des films à défaut d'autre chose :

Finalement cela a été un week-end très cinéma. Entre samedi et dimanche, trois films plus une exposition, c'est peut-être un peu beaucoup, ça aussi c'est sans doute un peu une fuite.

Je n'ai pas réussi à entraîner Constance. Elle était fatiguée, ne se sentait pas très bien, avait envie de rester à la maison. Moi je lui avais proposé ciné et resto ensuite, j'avais vraiment envie d'une petite sortie à deux, d'un moment pour nous, je me sentais en veine de parole, j'avais l'impression qu'elle était en état de m'entendre, tout ça c'est délité dès que j'ai senti qu'elle n'était pas très bien. N'aurais-je pas dû insister un peu plus, ai-je fui trop vite, préférant le refuge solitaire dans les salles obscures, préférant ma tranquillité au risque de la parole?

J'ai été au MK 2 Bibliothèque, j'aime beaucoup ce lieu finalement, la greffe prend, il commence à y avoir un peu de monde et d'animation dans ce quartier tout neuf mais en plus il y a du ciel , il y a de l'espace, on se sent moins enterré que dans les salles de Montparnasse ou du Forum des Halles, c'est bon avant ou après la séance de marcher sur l'esplanade, d'aller regarder couler la Seine, hier après-midi en plus un petit soleil tentait par moments après deux jours de pluie de lutter avec les nuages…

J'ai été voir " Nathalie… ", attiré plus par les actrices que par le thème du film. J'aime beaucoup Emmanuelle Béart, elle a le genre de beauté qui me plait, cela dit je ne l'ai pas trouvé très convaincante dans ce type de rôle et moins attirante avec les oripeaux et lourds maquillages de pute qu'elle porte ici très souvent. Il n'empêche que les scènes dans lesquelles elle décrit de façon crue ses rencontres sexuelles m'ont fait beaucoup d'effet, plus sans doute que si on en avait vu les images: c'est cela la puissance de la suggestion, elle laisse l'imaginaire de chacun libre d'y mettre ce qu'il veut.
J'ai été frappé par le vieillissement du visage de Fanny Ardant, je ne l'avais pas vue depuis " 8 femmes ", peut-être le rôle qu'elle tient ici imposait moins qu'on cherche à lisser son visage mais tout de même cet air si profondément las, fatigué, ces poches sous les yeux, cela m'a fait mal… Évidemment… Rien d'anormal… Elle vieillit... Comme nous... Et c'est un thème qui en ce moment est plutôt sensible chez moi !
J'ai aimé la révélation de la fin du film que je n'avais pas du tout vue venir d'ailleurs, j'ai trouvé qu'elle conférait soudain rétrospectivement aux personnages, à l'histoire, et surtout à la relation nouée entre Béart et Ardant un sens et une profondeur qu'ils n'avaient pas pendant toute la durée du film.

J'ai vu aussi " In the cut ". Ça c'est un film un cran au-dessus. Curieusement j'ai mis du temps à rentrer dedans, la façon de filmer me paraissait artificielle, avec cette façon hachée de présenter l'histoire et les personnages, avec ces incessants mouvements de caméra, avec ces effets visuels trop systématiques. Mais peu à peu je me suis laissé pénétrer par l'ambiance, par la sourde angoisse qu'instillent les lieux, les situations, les personnages. L'improbable personnage que joue Meg Ryan devient peu à peu crédible, la relation sexuelle qui se noue entre elle et l'inquiétant inspecteur de police m'a ému et m'a paru forte et vraie une fois que je l'ai admise. Et la façon de filmer alors m'a semblé coller parfaitement au fond du propos. Il y a un vrai style qui marque, bien plus que dans " Nathalie… ", beaucoup plus banal de ce point de vue. En sortant du cinéma j'étais encore un peu dubitatif, mais c'est un film qui gagne dans mon souvenir à mesure que les heures et les jours passent. Pour moi c'est un très bon critère de la qualité d'un film que l'impression qu'il me laisse après quelques jours. Certains qui m'ont plu sur le moment ne tiennent pas la distance et s'effacent très vite, ainsi d'un autre film que j'ai vu ces jours ci " Bambi ".

Là c'est simplement une mécanique bien faite, on passe un moment agréable (agréable, il faut le dire vite, un moment plutôt glacé et angoissant mais c'est le but du jeu), on se distrait au sens propre, en sortant on dit " c'était pas mal, c'était bien fait, c'était bien joué " mais trois jours après il n'en reste rien.

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