LES ÉCHOS DE VALCLAIR

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MOIS d'Avril 2004 (2°quinzaine)

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19/04/04 : Recension :

J'ai hésité à venir écrire ici. En ai-je vraiment envie ? Ou s'agit-il seulement d'un rite que j'accomplis ? Je me rends compte en tout cas que je me suis installé dans une attitude distante à l'égard de l'écriture, comme si c'était moins pour moi une nécessité intrinsèque, comme si, ayant en partie épuisé les charmes de cette expérience de mise en ligne dans ce qu'elle avait de nouveau, de revivifiant pour mon écriture en général, j'en avais du coup rendu caduc, moins attrayant en tout cas, le fait d'écrire en lui-même.

Enfin m'y voici quand même, sous forme de quelques notes sèches et rapides, recension pour mémoire…

Week-end au temps pourri, la randonnée prévue s'est transformée en des séances de cinéma. Deux films vus, deux beaux films, très différents :

" Shara " de Naomi Kawase, film assez étonnant, il m'a fallu résister contre le sommeil pendant toute la première partie, j'ai même eu envie de sortir tant j'avais du mal à garder les yeux ouverts, il y a quelquechose d'hypnotique dans cette caméra qui jamais ne se pose, toujours en mouvement, pour parcourir un décor, pour suivre les incessantes déambulations des personnages dans les vieux quartiers de Nara, comme une frénétique course-poursuite, l'image trop mouvante, à peine nette, fatigue le regard, nous éloigne de ces gens qui s'agitent sur l'écran, auxquels on ne croit pas, on reste distancié d'eux, on s'ennuie. Peut-être est-ce voulu, peut-être est-ce une façon de nous mettre nous-mêmes dans une sensation d'absence, peut-être est-ce le prix à payer pour mieux jouir de la seconde partie magique du film. Car tout à coup tout change. L'absence se mue en présence. Présence des êtres et des corps dans la scène du défilé soudain noyé de pluie, présence intense de tous les personnages pendant l'extraordinaire scène de l'accouchement qui dégage une émotion qui m'a fait perler des larmes au coin des yeux, à moi qui ne pleure jamais au cinéma, présence enfin du paysage et de toute la création pendant la lente montée qui clôt le film, au-dessus des toits, au-dessus de la ville, dans une sorte d'ascension vers le ciel.

" Mille mois " de Faouzi Bensaïdi, c'est une vision du Maroc et de ses contradictions dans les années 80 dans un village éloigné des grandes villes à travers les yeux d'un gamin sensible, beaucoup de thèmes se croisent, les rapports à la modernité et à la religion, la position des femmes, l'incurie de l'état, la répression politique, la pauvreté du plus grand nombre : C'est bien fait, bien joué, souvent drôle et émouvant, un peu long peut-être et la fin, un peu trop grandguignolesque, fait perdre une part de sa force au film.

Aujourd'hui travail sans grande conviction, je me perds entre beaucoup de choses que j'ai à faire, tant professionnelles que personnelles, j'ai du mal à décider de mes priorités et à m'y tenir, j'ai beaucoup traîné pas très agréablement, sans bien avancer, brève sortie dans l'après-midi, sans projet, juste pour m'aérer, juste parce qu'à l'intérieur comme toujours au bout d'un moment j'étouffe, j'ai joui alors de l'air frais, d'un de ces beaux ciels contrastés du printemps, luminosité très vive du soleil, nuages très noirs et menaçants, j'ai traversé un jardin, les cerisiers du japon en fleurs avaient été secoués par le vent et les averses de ces derniers jours, le sol à leurs pieds était complètement recouvert de pétales, comme par une fine neige rosée, juste une image, une belle image de ce jour…

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25/04/04 : Un week-end bien rempli :

Quel week-end magnifique ! Hier et aujourd'hui ciel complètement bleu, température fraîche à l'ombre mais avec un soleil qui déjà chauffe beaucoup. Rien que ça, ça fait se sentir bien. Les manteaux se replient, les vêtements sont moins contraignants, les jupes se font légères, les épaules se dénudent, que les filles sont belles !

On a sorti les vélos, hier on a passé la journée à arpenter le bois de Vincennes, arrivée par les quais, promenade d'abord le long du lac et sur les îles, beaucoup de fleurs dans cette partie du parc très paysagée, les barques sont de sorties, les familles canotent, les adeptes du bronzing sont déjà en maillot de bain sur les pelouses autorisées, c'est le premier jour où le soleil est suffisamment fort pour permettre ça, ensuite nous nous enfonçons dans la partie plus forestière, un peu moins envahie, nous nous posons un long moment dans l'herbe, j'ai un livre mais j'ai du mal à lire, je rêvasse, je regarde le ciel par l'échancrure des feuilles au-dessus de moi, j'écoute les oiseaux qui gazouillent. Nous rentrons par la promenade plantée, une coulée verte qui réutilise l'ancienne voie du chemin de fer de la Bastille, foule dense des jours de grand beau temps, piétons, cyclistes et rollers cohabitent comme ils peuvent mais dans la détente et la bonne humeur, nous rejoignons le quartier latin par l'île Saint Louis et Notre Dame, nous avons rendez-vous avec Papa pour aller ensemble au cinéma.

Aujourd'hui grande balade à vélo encore, cette fois surtout sur les quais de Seine pour profiter de ce que le dimanche les voies sur berge sont réservées aux cyclistes et aux rollers. Nous avons été voir l'expo " La Grande Parade, portrait de l'artiste en clown ", le beau temps a aussi cet effet que les gens sont dehors et pas dans les musées, je n'ai jamais vu aussi peu de queue dans ce genre d'exposition, il n'y a pas trop de monde à l'intérieur, au moins on peut profiter des œuvres à notre rythme, aller et venir, sans avoir à tendre le cou entre deux têtes pour voir quelquechose, quelques belles œuvres mais souvent assez connues, des Picasso notamment, quelques découvertes cependant, " le soir bleu " de Hopper assez impressionnant par exemple, je suis aussi resté scotché un moment devant " Freaks ", il y a dans ce film des scènes hallucinantes, sinon dans cette expo il y a beaucoup de choses inégales, pas toujours très cohérentes, elle ne me laissera pas un souvenir impérissable et j'en suis un peu déçu car je m'attendais à beaucoup d'émotion avec un tel thème.

Au ciné ce week-end on a vu " Viva Laldgérie " et " Vodka Lemon ", deux bons films là encore. J'aime bien décidément ce cinéma du monde qui nous sort des grandes machines hollywoodiennes et du cinéma psychologisant qualité France. Ça nous apporte un peu du souffle du monde, des images de sa pauvreté et de ses violences et ça nous fait du bien, à nous trop souvent obnubilés par nos problèmes de riches, de voir comment dans chacun de ces films, au-delà des situations catastrophiques, s'exprime la dignité humaine et se manifestent pour ceux qui ne renoncent pas de fragiles touches d'espoir.

En rentrant cet après-midi on s'est installé sur notre terrasse pour y couler tranquillement la fin de la journée et dîner sous les lilas qui sont en fleurs. J'ai sorti l'ordinateur j'ai commencé à rédiger ces notes dans le plaisir. J'ai réfléchi aussi sur les contradictions qu'induisent mes écritures internautiques et commencé à rédiger quelques lignes là-dessus mais j'ai sommeil, je m'arrête, ça sera pour demain ou plus tard.

Légère excitation pour Taupin. Il arrive à l'heure de vérité. Demain matin c'est le début des concours. Pas de travail aujourd'hui, il a passé une journée plutôt détendue, a été voir sa copine et s'est même offert ensuite le match PSG-Marseille. Il a l'air en forme et plutôt confiant. On a pris plaisir à préparer avec lui ces petites affaires pour demain, comme si c'était encore notre petit garçon et on s'en est amusé ensemble. Demain je vais me lever plus tôt pour assister à son départ et lui souhaiter bonne chance.

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27/04/04 : Tout écrire? ne rien écrire? écrire quand même !

Bien sûr quand j'ai commencé à écrire ici, j'étais conscient que je n'allais pas tout dire. D'ailleurs c'est marqué ici même, à côté, dans cette colonne de présentation sur ma page d'accueil, ce petit texte était là le jour où j'ai ouvert ma première page, je n'en ai pas changé une ligne depuis.

C'était une façon d'indiquer à mes éventuels lecteurs qu'ils ne trouveraient ici que des fragments de ce que je suis, de ce que je vis. C'était surtout une façon de me préserver moi de la tentation de vouloir tenter de tout dire, de résister à la pulsion d'exhaustivité.

Mais cette auto-limitation dans mon esprit ne devait avoir pour origine que mon envie ou ma non-envie d'écrire, il s'agissait seulement d'éviter de me créer des obligations, tant pis si je ne rendais pas compte de tel évènement intéressant, de tel spectacle qui m'aurait passionné, de tel livre qui aurait pourtant suscité en moi beaucoup de réflexions, de telle discussion intérieure jugée intéressante. Et tant pis si je restais silencieux pendant une longue période.

Mais en aucun cas il ne s'agissait d'exclure des éléments par volonté délibérée de les masquer à mes éventuels lecteurs, tout au plus m'autorisais-je à modifier des noms, à supprimer quelques détails pouvant faire reconnaître un lieu ou une personne.

Or cela n'est plus vraiment possible, je sais que désormais certains qui me lisent ou risquent de me lire ont des clés leur permettant de faire le lien, qu'ils l'ont déjà fait peut-être. Et cela ne peut que s'étendre. Certains des mondes finalement que je fréquente sont trop proches les uns des autres, l'anonymat sur internet est forcément précaire.

Il me faudrait donc tenir compte des autres dans ce que je dirais, non pas des lecteurs lointains et inconnus mais de tel ou tel précisément identifié que je croiserais demain, que j'aurais eu envie d'évoquer peut-être et qui peut-être, me lisant, se reconnaîtrait. Parlerais-je alors de lui en toute liberté ? Et lui même croiserait Constance, il la verrait à travers ce que je dis d'elle, percevrait des choses qu'elle n'aurait certainement pas dites elle-même et dont je me suis autorisé à parler parce que, en tout anonymat, cela n'avait aucune conséquence.

Constance sait que j'écris bien sûr mais ne me lit pas, les quelques pages qu'il m'était arrivé de lui mettre volontairement entre les mains en d'autres temps n'ont jamais abouti de sa part à une demande de me lire régulièrement, elle sait que c'est mon domaine réservé et je pense qu'elle préfère que ce soit mon domaine réservé. Mais elle ignore que j'ai un site sur internet, que ces paroles que je ne lui dis pas, que je ne lui lis pas, je les jette au grand vent de la toile, savoir cela sans doute lui plairait moins, Elle ne va que rarement sur internet, en tout cas jamais dans les mêmes secteurs de la toile que moi, elle n'a aucune raison de tomber sur mon site, mais si quelqu'un par mégarde ou par mauvaise intention venait à lui en parler, que penserait-elle ?

Or si je me mets à écrire différemment à cause du regard des autres, c'est tout mon projet d'authenticité qui est mis à mal. Ce n'est plus moi qui parle librement, en fonction de ce que je ressens le besoin de dire, c'est moi qui parle en fonction de ce que les autres en penseront et en diront, des interactions que ce que j'écris risquent de susciter.

Cela vaut-il la peine de continuer alors à mettre en ligne ?

Pourtant je ne me vois pas revenir à mon journal purement privé, j'ai l'impression que je n'aurais plus la motivation d'écrire pour moi seul, je suis heureux de me savoir lu et même apprécié par quelques uns, je suis heureux des interactions justement, les clins d'œil de l'un ou l'autre au détour d'une de ses pages, des mails reçus et échangés, des ouvertures que cela m'apporte, des rencontres à venir pourquoi pas dans la vie réelle.

Je vais continuer. Je n'écrirais pas différemment, pas différemment de façon consciente en tout cas. Il ne faut pas que je me dise en écrivant, je ne peux pas aller au bout de cette idée, au bout de cette émotion, au bout de ce ressenti parce qu'untel va me lire ou parce que ça peut venir aux yeux ou aux oreilles de Constance. Il faut que j'écrive tel que je pense. Et après seulement, au moment de la mise en ligne, peut-être, si je sens que ce qui est sorti peut poser problème, alors m'abstenir de mettre en ligne.

Bref c'est l'idée du journal à deux niveaux que je refusais pourtant jusque là. Cela m'apparaît finalement comme un compromis bien meilleur que l'édulcoration ou les transformations auxquelles je serais inévitablement conduit dans le cas contraire. Je ne dis pas qu'il m'arrivera souvent d'écrire une page que je ne mettrais pas en ligne. Mais je ne me l'interdis plus.

D'autant que la plupart des problèmes, il me semble, sont liés à l'immédiateté de la communication sur internet. Telle considération qui aujourd'hui pourrait donner de moi une image qui me gênerait ou blesser celui qui se reconnaîtrait en me lisant et créer des tensions avec lui, n'aurait pas du tout les mêmes effets, une fois que du temps serait passé. D'ici un an, deux ans, dix ans, rien ou presque de ce que j'aurais été amené à écrire ne pourrait affecter quiconque. Ce ne serait donc pas tout à fait les pages d'un journal bis, d'une sorte de cahier secret dans les marges du premier, ce serait simplement des pages en instance, simplement retenues, le temps qu'il faudrait. La distinction peut paraître un peu spécieuse. Elle ne l'est pas dans mon esprit. Ce qui me gênait à cette idée de journal double c'était ce clivage, ce partage en deux des expressions de ma personne. Je le vois désormais comme un journal unique, mon journal, dont je choisis de ne pas mettre en ligne certaines pages. Et plus tard, bien plus tard, puisque je n'envisage pas de détruire mes écritures et que j'aurais au contraire plutôt envie de les transmettre, il pourrait figurer dans son intégralité dans un quelconque cimetière de journaux intimes, dans une sorte d'Apa pour internautes.

J'avais défini il y a quelque temps (09/09/03) les fonctions (remémoration, connaissance de soi, plaisir d'écrire, communication) auxquelles répond pour moi la tenue d'un journal, dans ce double aspect de journal intime pour moi et de journal extime mis en ligne sur le net. Cette approche reste complètement la mienne. J'avais d'ailleurs bien repéré qu'il pouvait y avoir des contradictions entre certaines de ces fonctions, mais je voyais ces contradictions comme marginales, elles sont en réalité assez fondamentales et c'est le fait de les prendre en compte qui m'incite à accepter aujourd'hui que certaines pages puissent ne pas être mises en ligne contrairement à ce qu'était ma volonté au départ.

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30/04/04 : Pages 23 :

" Curieusement les souvenirs attachés à mes propres albums sont bien moins nets que ceux qui émergent en parcourant les albums composés par ma mère ." Martin Winckler, Légendes, Origines (clichés1)

C'est la 5° phrase de la page 23 du livre qui est en ce moment sur l'étagère à côté de mon lit. Je me suis livré moi aussi au petit jeu qui circule en ce moment chez quelques diaristes :

· Prenez le livre le plus proche de vous
· Ouvrez le à la page 23
· Trouvez la cinquième phrase
· Publiez la dans votre carnet ainsi que ces instructions.

Les phrases étaient plutôt longues et il n'était pas loin que la cinquième phrase soit la première de la page 24, j'ai choisi de considérer qu'un deux point mettait fin à une phrase, cela a été ma façon d'interpréter et donc de choisir de tomber plutôt sur une phrase que sur une autre.

Petit jeu sans conséquence mais qui parle tout de même de ce que lisent les gens, qui fait se caramboler des textes sans rapport et leur confère, par les proximités ainsi aléatoirement créées, une vague aura de poésie. Ça rappelle aussi quelques jeux surréalistes ou oulipiens qui font surgir parfois de leurs consignes arbitraires des productions étranges et plus parlantes que ce à quoi on se serait attendu.

Car l'amusant alors était de remonter le fil, de diariste en diariste, de citation en citation, Alainrêveur était en compagnie de Vian et de " L'écume des jours ", Cassandra rêvait avec Paulo Coelho et " L'alchimiste ", elle m'a mené vers Akelia et " De l'existence de Dieu " de Fénelon laquelle m'a conduit chez Alarmes légales dont le livre de chevet était " L'Art d'aimer " d'Ovide, de là j'ai trouvé " Libertad de Dan Frank chez Inclassable qui m'a mené vers " Origines " d'Amin Maalouf chez Hou-hou blog. Et de là j'ai basculé chez Karnabum, avec Douglas Adam et " The restaurant at the end of the universe ".
Je n'étais pas tout au bout de l'univers mais assez loin quand même, puisque j'étais en Californie et dans un blog anglophone.

Amusant, non… Ce sont les plaisirs de la promenade, des sauts de liens en liens, du connu vers l'inconnu. Et c'était bien le cas ici. Des diaristes rencontrés je ne connaissais que les deux premiers, j'ai aperçu chez certains de ceux que j'ai croisé aujourd'hui pour la première fois des pages vers lesquelles j'aurais envie de revenir. Le ferais-je ? Sans doute pas. Encore une fois je suis fasciné par l'immensité vertigineuse de cette galaxie diariste, attiré par ces portes que j'aimerais ouvrir, ces mondes que je ne fais qu'entrapercevoir…

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