18/03/05 : Risque d’overdose
:
Hier soir après le bureau je n’ai pas
été faire ma tournée des sites, je ne me suis
pas mis à la rédaction d’une entrée des
Echos de Valclair, c’est à peine si j’ai été
voir mes mails reçus. J’ai refermé l’ordinateur
presque aussi vite que je l’avais ouvert, j’ai poussé
un petit ouf de soulagement et je me suis dit, ce soir je fais autre
chose…
C’est sain et absolument indispensable de
se faire de temps en temps ces petits breaks. Pas de mots de moi,
pas de mots de tous ces autres mois que je traque à longueur
de leurs pages. Mon activité internautique est terriblement
prenante, elle fonctionne presque à la façon d’une
drogue, il y a une bonne vingtaine de diaristes que je suis à
peu près régulièrement, certains d’entre
eux ont la plume facile et la mise à jour quasi quotidienne,
leur lecture m’entraîne parfois à la suite de leurs
liens, c’est un des plaisirs ça, la balade qui de proche
en proche amène loin de son point de départ et fait
faire parfois des découvertes mais c’est sacrément
bouffe-temps. Il y a les commentaires que j’aurais envie de
faire ici ou là ou les coucous que j’ai envie de passer
juste pour manifester mon intérêt ou ma sympathie. Et
puis il y a l’envie de faire ma propre mise à jour, de
rendre compte d’une impression fugitive de la journée,
d’une pensée que j’ai eue, d’un livre que
j’ai lu ou d’un film que j’ai vu, est-ce vraiment
l’envie d’ailleurs, n’est-ce pas parfois plutôt
la panique à laisser filer, la peur de perdre. Or il faut accepter
de perdre, sinon le temps de la vie devient par trop celui de la remémoration
ou du commentaire. L’un dans l’autre j’y passe des
heures, par moments ça m’envahit, je me dis alors, attention,
stop, break à faire, il faut résister à l’envie
de la tournée et résister à l’envie de
mettre sa vie en notes.
Hier soir j’ai écouté de la
musique, j’ai pris des bouquins, de la fiction, ouf c’étaient
de tous autres mots, j’ai vogué avec eux ailleurs, loin,
et ce soir ça va être pareil, et je n’en dirais
pas plus. Et puis un week-end superbe s’annonce. On va tâcher
de filer un peu dans la verte campagne…
Retour au haut de page
23/03/05 : Matinal
:
J’aime bien être matinal. J’ai
quitté la maison vers six heures et demi, j’étais
au bureau avant sept heures et demi, je me suis mis au travail alors
que le bureau était encore fermé, j’y étais
seul, tout était calme. J’ai fait plusieurs courriers,
j’ai bien avancé sur plusieurs dossiers, alors maintenant
je me prends ce petit break, j’ai été faire un
tour chez les diaristes et je prends le temps d’écrire
ces mots.
Á vrai dire ce départ matinal s’est
fait suite à une mauvaise et persistante insomnie. Je me suis
réveillé avant quatre heures, rapidement sont venues
les pensées mauvaises et tournoyantes, j’ai essayé
de lire mais sans succès. Je me suis spécialement focalisé
sur la façon dont se présente notre week-end de Pâques.
Nous devions inviter la maman de Constance dimanche avec quelques
membres de la famille. Cela me convenait. Mais comme il manquait certaines
personnes Constance a essayé de trouver un meilleur moment.
L’unanimité s’est faite sur le lundi midi. Et là
tout le monde va venir, cela veut dire qu’on va se retrouver
à plus de vingt chez nous, que je vais me retrouver avec Constance
absorbé par l’intendance pendant tout le week-end. J’aime
bien recevoir et j’aime beaucoup faire la cuisine, mais j’apprécie
que ce soit en petit comité, là ou finalement les gens
peuvent se parler vraiment et dans un contexte d’organisation
et de préparatifs pas trop lourds. Tout le contraire de ce
à quoi on va aboutir. Et je n’aime pas ces assemblées
obligées où tout le monde se sent plus ou moins tenu
de venir pour que la grand-mère ait tout son monde. Je le sais.
Je le dis. Et pourtant j’ai laissé ce changement se faire,
je me suis contenté de marmonner sans conviction quand Constance
m’a proposé cette modification, je n’ai pas assumé
clairement ma non-envie de ce raout familial et je me sens maintenant
coincé et dépité et surtout agacé et même
un peu plus d’avoir laissé faire, de n’avoir pas
été capable de dire ce dont j’avais réellement
envie. Et c’est cela surtout qui m’accable, qui donne
au fait, en lui-même peu important, une résonance qui
le dépasse et qui m’atteint en profondeur.
Plutôt que de rester dans mon lit à
tourner ces pensées et quelques autres pas plus réjouissantes,
j’ai préféré me lever dès les premières
lueurs de l’aube. J’ai déjeuné, je me suis
préparé alors que Constance et Bilbo dormaient encore
et je suis parti dans la fraîcheur du matin, air vif, ciel clair,
la journée qui s’annonce est magnifique, en quelques
jours les arbres se sont couverts de jeunes feuilles, les oiseaux
chantent, ça sent vraiment le printemps et c’est merveilleux,
mon envie de campagne est décuplée, envie d’y
aller s’y promener mais envie d’y vivre plus encore, envie
d’en avoir un contact proche, dans le quotidien. Y viendrais-je
vraiment et quand et comment ?
J’ai rejoint mon bureau par de petites rues
tranquilles et en musardant quelque peu. Cela m’a fait du bien
et m’a permis de rentrer malgré tout dans ma journée
avec assez d’énergie et de positivité.
Retour au haut de page
25/03/05 : Un beau
vendredi :
Réunion professionnelle dans le 20° ce
matin. Il fait déjà clair dans mon quartier un peu surélevé
au moment je me m’engouffre dans le métro mais un peu
plus loin, là où la ligne devient aérienne, au
passage de la Seine, tout est brouillé encore, une brume évanescente
monte du fleuve, les tours de la bibliothèque se distinguent
à peine et de l’autre côté le chevet de
Notre Dame est lui totalement invisible, mais la rivière scintille,
on sent que le soleil est tout près, que cette brume est une
promesse...
Nous travaillons assez vite et bien. On ne traîne
pas pour une fois, on ne s’égare pas. Du coup, génial,
dès onze heures on a fini, me voilà libre plus tôt
que prévu.
Je redescends à pied, je m’engage dans
le Père-Lachaise. J’aime ce lieu. Les tombes y sont enchevêtrées,
on est à la ville n’est-ce pas, les morts qui ont été
serrés leur vie durant dans l’empilement des immeubles
urbains le restent dans la mort. Mais ce n’est pas un découpage
banal d’allées longilignes qui se couperaient à
angle droit, il y quelques axes certes mais des allées circulaires
aussi et même de petits sentiers tortueux qui se glissent entre
les tombes, surtout dans la partie que j’aime le mieux, celle
qui est sur la rupture de pente, là où le relief est
assez marqué. Je passe devant le funerarium, c’est service
continu ici, il y a donc des groupes qui attendent une cérémonie
et d’autres qui s’attardent après celle-ci, ici
ce n’est pas qu’un beau parc avec des tombeaux du passé,
c’est aussi le lieu de deuils et d’afflictions bien contemporaines,
j’y suis venu deux ou trois fois d’ailleurs en situation.
Je dépasse un groupe, famille mixte franco-asiatique, beaucoup
de visages et de costumes sombres mais un enfant rieur aussi dans
sa poussette sur laquelle se penchent famille et amis en souriant,
la vie continue…
Je me promène. Je vais et reviens au gré
de mon inspiration, attiré seulement par une perspective ici,
un coup d’œil là. Je croise des visiteurs plus «
professionnels », armés de guides et de plans qui vont
de tombe de célébrité en tombe de célébrité.
Ce n’est ce que je cherche même si au hasard je croise
Gilbert Bécaud à côté de Marie Trintignant
tous deux très fleuris puis un peu plus loin Molière
côte à côte avec La Fontaine dans un enclos commun.
Ce que j’aime plutôt ce sont les voisinages de hasard,
la confrontation des styles, les monuments un peu pompeux aux allures
de temples, les pyramides à la froide géométrie,
les socles baroques que surmontent des représentations de toutes
sortes, portraits ou allégories, et puis les pierres toutes
simples aussi aux inscriptions parfois à demi effacées.
Il y a le marbre brillant qui cotoie la pierre rongée, il y
a les tombes nettoyées, apprêtées et fleuries
et celles, plus émouvantes peut-être, dont se devine
l’abandon, celles que couvrent des mousses envahissantes ou
sur lesquelles grimpent des lierres qui s’entortillent parfois
jusqu’au haut des colonnes.
J’ai sorti mon appareil photo. Mon plaisir
se redouble à chercher le cadrage qui me plaira, non pas spécialement
la belle image mais celle qui dira un peu de ce que je ressens.

|
|
|
J’ai cherché ensuite un lieu où
déjeuner. Équation difficile. Je veux une terrasse bien
sûr, hors de question d’aller m’enfermer à
l’intérieur, mais je la veux un peu dégagée
du fracas et des fumées du trafic, mi-ombre, mi-soleil si possible.
J’ai trouvé mon bonheur. Un peu en retrait de l’avenue
Gambetta, sur une placette, je m’y suis senti délicieusement
bien, un poisson au fenouil, un pichet de muscadet, une tarte, un
café, je me serais bien attardé. J’ai sorti mon
cahier pour tenter d’écrire. Impossible. Je ne suis pas
décidément un « écrivain » des cafés
! Je suis trop absorbé par tout ce qui se passe autour de moi,
j’observe la serveuse un peu trop stressée, dommage,
j’aurais eu plaisir à lui dire que ce que j’avais
mangé était bon et que j’étais bien, j’aurais
eu plaisir à échanger un sourire de reconnaissance avec
elle, j’ai tenté de manifester mon amabilité mais
sans réponse elle était trop prise dans le coup de feu
du midi. J’observe mes voisins de table et les passants surtout,
Paris, quand on regarde, est un voyage : voici un « cheik »
(où un qui se joue cheik), belle prestance, entièrement
vêtu de blanc des babouches au cheich, portant dignement une
belle canne sculptée, tenant un livre à la main en marchant
(un coran ?), passent d’ailleurs beaucoup d’autres hommes
revêtus de la calotte blanche musulmane (c’est vrai nous
sommes vendredi et je pense qu’il doit y avoir tout près
une mosquée ou une salle de prière). Autres spécimens
d’humanité, voici un petit type bedonnant avec un grand
chapeau noir et des bottes de cow-boy, un accoutrement cocassement
décalé de son apparence physique, voici une demoiselle
trop jolie au jean taille très très basse, une perle
brillant dans le nombril et qui s’attarde sur la placette en
minaudant avec ses copines pour mon plaisir et voici un peu plus tard
une fille au style gothique, vêtue de noir, breloques pendantes,
visage émacié et d’une pâleur à faire
peur, oui vraiment je préfère la minette… Et puis
il y a les gens, les gens tout simples qui passent et qu’on
suit de l’œil, juste comme ça, sans penser, c’est
juste un peu de vie qui passe...
J’ai continué ma marche ensuite. J’ai
pris la rue du Chemin Vert. Jamais je n’avais emprunté
cette rue, il en reste encore des rues de Paris que je n’ai
pas foulé de mon pied ni même parcouru en vélo
! Etrangeté : la tour Montparnasse, lointaine pourtant, est
exactement dans l’axe de la rue, on croirait pouvoir la rejoindre
en droite ligne. Un peu de côté j’aperçois
un square : J’y vais : Square Maurice Gardette, jamais vu, jamais
entendu parler, j’en fais le tour, je m’assois un moment
sur un banc, square parisien comme bien d’autres avec ses gamins
qui jouent sur l’aire de jeu, ses amoureux qui s’embrassent,
son kiosque au milieu pour les fanfares et musiques…

Basculement d’ambiance. Le long de la rue
ce ne sont que boutiques de vêtements, ateliers de fabrication
de prêt-à-porter, vente à prix de gros ou demi
gros, import-export, c’est un peu comme un nouveau Sentier mais
ici ce ne sont pas des sépharades d’Afrique du Nord,
ici c’est l’Asie, des chinois je pense...

J’aborde la Bastille. Je fais le tour de la
place, descend dans le port de l’Arsenal, le port de plaisance
de Paris, oui, oui,il y a un port de plaisance à Paris, bateaux
amarrés, mini-péniches, vedettes, voiliers sans voile,
tout ça porte avec soi des envies de voyages…

Ma jambe commence à fatiguer. Je reprends
le métro. Je rentre à la maison, je sors l’ordinateur
sur la terrasse, je m’installe sous le forsythia en fleurs,
les oiseaux pépient, je n’ai pas encore vus nos merles,
viendront-ils construire un nid ici comme l’an dernier, je me
mets à écrire, voilà…
Et maintenant au moment de mettre en ligne je me
souviens que j’ai déjà écrit sur une balade
au Père-Lachaise. Ça m’amuse de retrouver. Voilà,
c’est là, 30 janvier 2004,
plus d’un an déjà, je relis, il y a du pareil
dont je ne me souvenais pas et il y a du différent, ainsi va
la vie…
Retour au haut de page
26/03/05 : Le rêve
de l’autre nuit :
Habituellement mes rêves sont présents
au moment même du réveil : Dans certains cas ce sont
eux qui m’éveillent brusquement, dans un cauchemar par
exemple ou, plus agréablement, à l’occasion de
rêves sexuels, je m’éveille alors avec une image
forte, intense, précise dans les yeux à partir de laquelle
je remonte le déroulé du rêve qui a mené
jusqu ‘à elle. Dans d’autre cas il y a une transition
douce, un passage progressif de l’état de rêve
à l’état d’éveil sous des formes
différentes créant des sensations troublantes, parfois
je me dis : « ah mais ça ce n’est pas réel,
c’est un rêve » et j’ai ce doux privilège
de me regarder rêver, parfois au contraire c’est l’inverse,
c’est le rêve qui s’impose dans la réalité,
j’ai du mal à me convaincre que j’étais
en train de rêver, que ce que je viens de voir n’était
pas le réel. De quoi par moments faire sien le fameux aphorisme
du philosophe chinois se demandant s’il était un philosophe
chinois se rêvant papillon ou bien s’il était un
papillon se rêvant philosophe chinois…
Le rêve de l’autre nuit au contraire
n’était pas présent à mon réveil.
Je suis resté au lit un bon moment, j’ai même lu
un ou deux articles de journal, ce n’est qu’au moment
où j’ai dû me lever que je me suis dit : tiens
mais cette nuit j’ai fait un rêve et que des lambeaux
m’en sont revenus. Je les ai juste passés dans ma tête,
je n’ai pas eu le temps sur le moment de les explorer, de tenter
d’en récupérer d’autres séquences
et de les noter, je devais me préparer pour partir. Mais le
thème en était suffisamment intriguant et intéressant
pour que je tente d’y revenir.
Il ne m’en reste pas grand-chose : il y avait
une séquence dans un ascenseur, un ascenseur qui ne finissait
pas de monter, ou plutôt qui s’arrêtait chaque fois
à un mauvais étage, des gens montaient, descendaient,
appuyaient sur les boutons faisant repartir l’ascenseur vers
une destination qui n’était pas la mienne et je m’angoissais
car cela me mettait en retard pour mon rendez-vous.
J’allais voir une psy, ce n’était
pas un cabinet d’analyste ou de thérapeute mais un lieu
qui ressemblait plutôt à un service hospitalier. Je m’installais
dans un lit, je n’étais ni tout à fait habillé,
ni tout à fait en pyjama, je remontais le drap sur moi avec
le sentiment qu’il y avait quelquechose qui ne collait pas dans
la situation. Constance était là aussi, je lui disais
que ce n’était ni une thérapie familiale, ni une
thérapie de couple, elle se mettait un peu de côté
mais elle était là, m’observant. La psy arrivait,
une femme entre deux âges, plutôt avenante, souriante,
elle s’approchait de moi en se moquant gentiment : « mais
que faites-vous dans ce lit, ce n’est pas votre place…
», elle retirait le drap, je m’asseyais sur le lit, elle
prenait un siège à côté de moi…
Voilà les images qui me sont revenues, assez
fortes mais comme sorties du brouillard et sans que je sache sur quoi
et comment le rêve s’est achevé. Sentiment de frustration.
En même temps je me méfie un peu de ce rêve, ou
de la façon peut-être dont il s'est reconstitué
en moi, sa lecture m'en parait si claire que ça la rend presque
louche: l’impuissance à maîtriser ma vie (le voyage
en ascenseur), l’envie et la peur de la confrontation avec Constance
(sa présence muette), l’intrication du physique et du
psychologique (la psy et le lit d’hôpital).
Retour au haut de page
30 mars 2005 : Bilan d’après
Pâques :
Je n’ai pas vécu ce week-end de Pâques
dans l’harmonie et la sérénité, c’est
le moins qu’on puisse dire et j’ai tendance à m’en
vouloir ce qui n’arrange rien. Moment de renouveau ? Passion,
Résurrection ? Tu parles… Ma tradition mécréante
fait que je n’ai jamais spécialement vécu ces
moments comme des Célébrations mais disons que souvent
j’étais tout de même porté par une certaine
ambiance et puis après tout en dehors de la tradition catholique,
c’est aussi tout simplement le moment du retour du printemps
et cela, tous, nous le partageons. Mais cette année, non, je
n’y étais pas vraiment…
J’ai eu des quantités de petites misères
de santé ces derniers temps. Mal de ventre, mal de dos, des
douleurs baladeuses sans lieu d’application précis. Mais
des soucis prostatiques aussi qui commencent, ils sont porteurs, même
s’ils sont très banaux, d’une charge psychologique
particulière, j’ai l’impression de rentrer dans
un autre âge. Et puis surtout ces tous derniers jours, j’ai
trimballé une douleur gênante, persistante et surtout
très anxiogène dans le flanc gauche. La machine qui
a toujours parfaitement fonctionnée (je n’ai jamais fait
de séjour à l’hôpital et je n’ai guère
dû prendre plus de quinze jours d’arrêt de maladie
au total depuis que je travaille c’est à dire depuis
une trentaine d’années, de cela déjà je
devrai rendre grâce !) me donne l’impression de commencer
à rouiller pour de bon. Il est vrai que je suis habitué
à somatiser, de petites somatisations légères,
ces douleurs baladeuses qui s’appliquent ici ou là, j’ai
pratiquement toujours connu ça, elles partent comme elles viennent
de façon imprévisibles, douleurs parfois vives sur des
points très précis de ma carcasse, qui me font imaginer
je ne sais quel crabe malveillant en train de s’installer, poids
dans la poitrine ou palpitations qui me font m’imaginer au bord
de la crise cardiaque. Je me suis habitué au fil des années
après quelques examens montrant que tout allait bien, j’ai
appris à vivre avec ces gênes passagères et à
ne pas leur donner plus d’importance qu’elles n’en
ont, ce qui est la meilleure façon de les mettre à distance
et de les faire s’évanouir. Mais là c’est
un peu différent, tout ça se succède avec trop
de proximité, dans trop de domaines à la fois, je n’ai
jamais fait autant d’examens médicaux que depuis ces
derniers mois, cela crée un climat. Mais c’est aussi
sûrement que ça ne va pas toujours au mieux dans la tête
ces derniers temps, qu’est ce qui est cause, qu’est-ce
qui est conséquence, en tout cas le rêve de la psy et
du lit d’hôpital n’est sûrement pas venu par
hasard.
Je me suis laissé enfermer dans mon malaise
une bonne partie du week-end, agacé de devoir recevoir à
la maison toute la troupe familiale de Constance, anxieux, on se demande
bien pourquoi, de la façon dont ça allait se passer,
les préparatifs à assumer, l’appartement trop
resserré pour accueillir tout ce monde, bref des soucis absurdes,
tout est dans l’accueil, cette famille est suffisamment cool
pour que personne ne se formalise si les petits plats ne sont pas
dans les grands et si on est un peu entassé, d’ailleurs
chacun avait amené une partie du repas, nous n’avons
pas eu tant que cela à faire, tout s’est passé
à la bonne franquette, dans une ambiance agréable, pourquoi
donc m’étais-je à ce point mis en souci ?
J’ai aussi fait ce geste d’écrire
et surtout de parvenir à donner à Constance un texte
où je parle de certaines de nos difficultés. J’ai
essayé de tenter enfin un peu de ce dialogue qu’il nous
faut tenter d’avoir. Elle a été peu réceptive
ou peut-être effrayée, comme je le suis moi-même.
J’ai l’impression d’avoir fait un petit pas, il
faudrait que le second vienne d’elle mais rien ne vient, il
faut dire que je n’ai pas rendues les choses faciles ce week-end,
en étant toujours plus ou moins dans la tension, dans l’agacement
à propos de tout, de ce repas à préparer, dans
mes douleurs diverses et variées. Et je me sens incertain,
ai-je vraiment envie de relancer, de vouloir être volontariste
ou bien est-ce que je laisse aller, voilà, je me suis donné
bonne conscience, si elle veut, elle peut, elle n’a qu’à
reprendre la balle au bond, sinon tant pis, on ne vivra pas plus mal,
on continuera chacun dans notre petit ronron, avec nos soucis du quotidiens
et nos petits plaisirs côte à côte…
Tout ça se mélange sans que je le
domine, je me laisse porter au gré des moments, parfois je
me sens bien, parfois complètement enferré, je ne sais
pas tirer un fil, suivre une direction, je me laisse ballotter, je
ne me sens pas glorieux, pas du tout, pourquoi est-ce que je n’arrive
pas à gérer tout cela mieux, il me semble que j’ai
ce qu’il faut pour le faire.
Je n’ai pas repris le yoga cette année.
J’ai eu tort peut-être. Même si ce n’était
qu’une courte pratique hebdomadaire, il me semble quand même
que ça me donnait au moins une respiration dans la semaine,
un moment propice à la détente du corps et de l’esprit,
permettant l’évacuation d’une part au moins de
ces tensions de tous ordres que j’accumule sans les maîtriser…